Depuis maintenant un peu plus de 2 ans, il a sauté le pas en créant sa propre entreprise : « One More Cast » (OMC). Un nom choisi comme un clin d’œil poétique à ce fameux « dernier lancer » que nous voulons tous faire lorsque vient l’heure de quitter les berges, pour faire durer le plaisir au maximum…
Bonjour Ali. Tout d’abord, merci beaucoup d’avoir accepté de consacrer un peu de ton temps pour répondre à nos questions. Tu es un pêcheur bien connu au Royaume-Uni et en France, mais peux-tu te présenter et nous en dire plus sur toi en tant que pêcheur et sur ton métier ?
Les gens me connaissent principalement à travers la pêche de la carpe, mais il est également important de dire à quel point je suis obsédé par la pêche de façon globale. J’adore être au bord de l’eau, j’aime les poissons, la nature, les animaux, le grand air, l’équilibre de l’esprit que l’on atteint lorsque l’on s’absorbe dans toute forme de pêche à la ligne. Par chance, sur le plan professionnel, mon amour de la pêche a réussi à se combiner avec ma passion et mon expertise dans les médias et le marketing.
Tu as été l’un des plus célèbres membres de la marque Korda pendant de nombreuses années. Qu’est-ce qui t’a poussé à la quitter et à créer ta propre marque « One More Cast » ?
Ce fut le choix de carrière la plus difficile de ma vie. J’ai en effet quitté des collègues qui sont aussi et avant tout des amis que j’aime. Mais j’ai vraiment senti que j’avais plus à offrir dans ma carrière. Être PDG et propriétaire d’une entreprise et pas seulement chef de service a été la motivation première, et être approché par de grands investisseurs qui croyaient sincèrement en moi et m’avait « étudié » était flatteur. Mais en même temps, l’idée de construire quelque chose de A à Z autour d’une vision commune avait un énorme attrait. Nous avions accompli beaucoup de choses chez Korda en tant que groupe, et je savais qu’en partant je n’affecterais pas la marque négativement, parce qu’elle est devenue si grande et a un tel succès maintenant qu’il s’agit pour l’équipe de maintenir ce cap. Je voulais donc travailler à construire quelque chose de nouveau, car c’est ce qui est le plus excitant pour moi. L’ascension a pour moi plus de sens que la vue une fois arrivé en haut, pour employer une métaphore. La décision la plus facile aurait été de rester, la plus difficile était de partir, et j’ai dû beaucoup me regarder dans le miroir en me demandant « pourrais-je vivre avec le regret de ne pas avoir essayé » ? La réponse était non... Si nous n’avions pas lancé OMC, je me serais toujours demandé « et si… » !
J’ai toujours été passionné et j’ai traité Korda comme si la marque était une partie de moi, mais en réalité ce n’était pas le cas, elle appartient à 100 % à Danny Fairbrass. Sur le plan créatif et stratégique, j’avais atteint un stade de ma vie où j’avais besoin de liberté de pensée, pour essayer des choses inspirées par mes connaissances, mon caractère, mes émotions et ma passion, plutôt que de créer une stratégie/ des idées basées sur les visions de quelqu’un d’autre. Ne vous méprenez pas, il n’y a absolument rien de difficile à travailler pour une personne aussi formidable que Danny, qui est un homme inspirant et un leader passionné. Ce furent donc 16 années très agréables. Cependant, j’ai également une passion, une énergie et un dynamisme immenses pour mon travail et parfois, il faut être honnête avec soi-même pour réaliser que l’on peut faire plus, que l’on peut se dépasser davantage, et l’option facile de rester n’était donc pas confortable pour moi. Et nous voilà maintenant, environ 28 mois plus tard ! Certains jours, je pense que c’est la meilleure décision de ma vie, absolument pas pour des raisons financières, mais pour des choses simples, comme lorsque l’on progresse dans le développement d’un nouveau produit ou que l’on entend le retour positif des clients qui utilisent nos produits, ce qui apporte de grandes satisfactions. D’autres jours, vous vous demandez « mais dans quoi diable me suis-je lancé »! En parlant avec d’autres propriétaires d’entreprise, c’est en fait un questionnement tout à fait normal. Seul le temps dira si c’était une sage décision ou si c’était trop ambitieux, mais tout ce que je peux dire, c’est que très peu de personnes, dans quelque secteur que ce soit, font autant d’efforts que nous chaque jour. Nous sommes une petite équipe et nous avons probablement réalisé l’équivalent de 4 à 5 ans de travail en peu de temps, car nous nous y consacrons entièrement. Ce n’est pas un rythme durable, j’ai sacrifié les éléments fondamentaux de ma vie, la vie sociale, le temps libre, 7 jours sur 7 et chaque semaine jusqu’à maintenant. J’ai toujours été motivé par la peur de l’échec, alors j’espère qu’avec le temps vient la confiance, et qu’avec la confiance vient l’équilibre… Quoi qu’il en soit, c’est une expérience amusante et passionnante !
Peux-tu nous en dire plus sur OMC : quelle est la taille de votre équipe, avez-vous des testeurs sur le terrain ?
One More Cast (OMC) est encore une petite équipe, mais elle grandit chaque jour. Oui, nous avons des testeurs sur le terrain. Certains que vous voyez régulièrement sur les réseaux sociaux, et d’autres qui ne sont pas dans les médias mais en qui j’ai une grande confiance pour leurs retours sur les produits. En France, nous cherchons à développer une équipe formidable avec j’espère un avenir similaire à notre vision au Royaume-Uni. Stéphane Gentile est impliqué avec nous depuis plus d’un an maintenant, et nous communiquons ensemble et avec mes autres amis en France pour former une équipe adaptée, pour aider à communiquer sur notre marque dans toute la France et l’Europe.
Peux-tu nous expliquer comment sont fabriqués vos produits, depuis la première idée jusqu’au développement et la mise sur le marché ?
Cela varie beaucoup. Cependant, chez OMC, chaque produit mobilise beaucoup de passion. Même nos plus petits produits comme les « Dazzlers Bloodliners » ou « Hookbeads » partent d’une idée qui germe dans nos têtes, elles sont ensuite esquissées sur papier, avant d’entrer dans la conception assistée par ordinateur (CAO), l’échantillonnage et les tests. Le processus de développement des produits est parfois très long, car nous sommes perfectionnistes chez OMC et nous voulons vraiment que tout se passe bien. Ainsi, lorsqu’un pêcheur utilise les produits One More Cast, il n’a aucune inquiétude à avoir, car il sait que le travail et les tests nécessaires ont été envisagés et réalisés. On peut parfois avoir de la chance pour certains produits qui arrivent plus tôt sur la ligne d’arrivée, tandis que d’autres peuvent prendre beaucoup plus de temps que prévu car de petits ajustements sont nécessaires. Par exemple, « The Lock Hook », qui sortira très bientôt, a été dessiné par moi sur un morceau de papier lorsque nous avons démarré l’entreprise, puis il a subi des petits ajustements constants, amenant de nouveaux échantillons et des tests répétés, jusqu’à ce que nous ayons atteint notre objectif de créer un hameçon qui, selon nous, sera un produit emblématique en la matière.
Justement, quel est selon toi le produit OMC le plus emblématique et pourquoi ?
Il est difficile d’en identifier un seul, car au Royaume-Uni nombre d’entre eux sont extrêmement populaires et bien accueillis. Nous savons que notre « Cool Tool » (outil multifonction) a été reconnu internationalement comme quelque chose de vraiment spécial lors de son lancement à l’hiver 2022. Le « Blend Putty » (pâte plombée) est considéré par beaucoup de pêcheurs de toute l’Europe comme le meilleur jamais réalisé dans la pêche à la carpe. Il ne s’agit pas seulement de mes mots, mais des paroles des gens avec qui j’échange un peu partout. Je peux également citer la gamme « Dazzlers » et bien sûr Le désormais très célèbre « Magic Twig » !
Venons-en justement à ce nouveau produit que vous avez récemment lancé sur le marché, le « Magic Twig », que vous présentez comme une grande (r)évolution dans le monde de la pêche de la carpe. Peux-tu nous expliquer comment il est né, comment il fonctionne et pourquoi tu penses qu’il est si efficace ?
Le concept initial de ce montage auto-déclencheur m’a été présenté le 16 juillet 2021 par un gars « normal », c’est-à-dire lié à aucune marque, juste un carpiste « old school » passionné. Dès que j’ai vu son idée, j’ai su que cela aiderait à résoudre beaucoup de frustration que j’avais personnellement ressentie en filmant sous l’eau et en voyant tant de carpes secouer l’hameçon sans se piquer après avoir aspiré l’appât! Les gens pensent qu’un plomb lourd fait l’affaire, mais ce n’est pas toujours le cas. Jusqu’à l’arrivée du « Magic Twig », j’ai toujours pensé que nous ne transformions qu’environ 30 % des touches en poissons correctement piqués. Parfois plus, parfois moins, car il y a bien sûr beaucoup de variables. Avec le Magic Twig et lors des tests sous l’eau, nous avons converti 100 % des touches en poissons accrochés. Bien sûr, cela ne peut pas continuer éternellement, je ne crois pas que quelque chose puisse transformer à 100 % chaque touche en poisson qui termine dans l’épuisette. Il y a les moments de malchance, les poissons qui se nourrissent lentement et/ ou en se déplaçant vers le plomb, tout cela peut faire la différence. Cependant, le Magic Twig a été l’ajout le plus remarquable que j’ai vu à un système de montage dans toute ma vie de pêcheur. C’est un peu moche à regarder, certes, mais il faut que ce soit conçu comme cela pour fonctionner en toute sécurité et de manière très efficace. Je l’utilise intensément depuis plus d’un an et j’ai travaillé sur le projet pendant plus de 2 ans, donc j’en suis complètement accro et je réalise maintenant à quel point il est devenu crucial pour ma pêche.
Ce produit semble cependant très controversé au Royaume-Uni, et il commence également à faire parler de lui en France et sur le continent. Certains disent, avec parfois des vidéos à l’appui, qu’il n’est pas sécuritaire et pourrait être dangereux pour les carpes. C’est pour cette raison que pas mal de centres de pêche privés ont décidé de l’interdire sur leurs eaux. Peux-tu nous expliquer, de ton point de vue et d’après tes observations, pourquoi tu penses que le Magic Twig peut être utilisé en toute sécurité, même dans des eaux encombrées ou herbeuses ?
J’ai tendance à ne pas écouter ni respecter l’avis des gens qui tirent des conclusions péremptoires sans avoir utilisé le produit pendant un certain temps. La polémique au Royaume-Uni est née dès son apparition sur le marché, mais elle n’est basée sur aucune donnée concrète. Les seules personnes qui disposent de données sont la marque OMC et les centres de pêche qui nous ont réellement vus utiliser ce produit sur leurs eaux pendant la période confidentielle de tests. Comme je l’ai dit plus haut, l’aspect particulier du Magic Twig peut laisser penser qu’il peut s’accrocher, mais en réalité sous l’eau les montages ne fonctionnent tout simplement pas comme les gens le pensent. C’est en fait un produit assez remarquable dans les mauvaises herbes et les obstacles, et le manchon en caoutchouc d’un classique clip-plomb ramassera plus d’herbe que The Magic Twig. C’est un fait. Cependant, si dans la vie tout ce que vous avez vu est en forme de cercle et que quelqu’un vous montre un carré, cela peut vous déstabiliser un peu. Certains pêcheurs profitent aussi de ce produit pour faire le buzz et avoir leurs 5 minutes de gloire, là encore sans avoir de données autres que leur avis. Personnellement, je n’ai aucun respect pour cela. De plus, voir d’autres entreprises commenter négativement les produits d’autres entreprises est profondément non professionnel, en plus d’être en partie illégal dans le droit européen. C’est quelque chose que je n’ai jamais fait, et si jamais je commente les produits d’autres marques, c’est élogieux et non impoli, sinon je me tais…
En ce qui concerne l’utilisation en situation pêche, j’ai dans un premier temps partagé beaucoup de leurs points de vue lorsque nous avons réalisé que la conception du produit devait être telle qu’elle est maintenant. C’est pourquoi nous avons testé le produit si durement pendant un an dans de nombreuses situations, car au final je souhaitais créer un produit que je pourrais utiliser absolument partout. Lorsque l’on est propriétaire d’un lac et qu’on ne comprend pas un produit, cela crée de l’inquiétude, et la solution qui apparaît la plus simple est de l’interdire. J’espère qu’avec le temps et la connaissance réelle du Magic Twig, cela changera. J’ai été confronté à une situation similaire il y a plus de 12 ans en tant que pêcheur passionné qui adorait le « Goo » (ndlr: liquide de trempage et de boostage olfactif et visuel pour appâts). J’étais alors l’un des seuls à approuver ce produit au sein de Korda, de nombreux lacs l’avaient alors interdit au Royaume-Uni en disant qu’il allait rendre les lacs verts et tuer les poissons… Comme nous le savons tous, cela s’est avéré être une inquiétude non fondée ! Le produit est désormais légendaire et largement copié dans la pêche de la carpe. J’ai donc déjà vu ce type d’incompréhension et d’attitude, et je sais rester calme et confiant dans les tests et dans mon travail. Avec le temps, un produit fait parler de lui de façon positive et les propriétaires de plan d’eaux qui l’ont d’abord interdit peuvent reconsidérer leur décision, lorsqu’ils réalisent qu’il n’est pas pire que les autres systèmes qu’ils autorisent déjà sur leurs lacs. Car avouons qu’autoriser le système hélicoptère et feeder mais interdire le Magic Twig, c’est assez peu cohérent…
Je pose toujours la même question « piège » lors des interviews : si tu ne pouvais utiliser un seul ensemble canne/moulinet/corps de ligne/ système de plomb/bas de ligne et appât pour le reste de ta vie, peu importe où tu devrais pêcher la carpe, que choisirais-tu, et pourquoi ?
En me basant sur ce qui est disponible aujourd’hui: le Magic Twig combiné avec un clip de plomb OMC spécial que nous développons. Un Spinner Rig réalisé avec le nouvel hameçon « Lock Hook » et des aligneurs de ligne « Dazzlers Bloodliner ». En ce qui concerne les appâts, une belle pop-up ou un wafter boosté avec du Goo, placés sur un mélange d’appâts s’il n’y a pas trop de poissons « nuisibles ». J’aime faire un mélange composé de bouillettes Mainline comme les « Cell », de Pellets, de vers et de noix tigrées. Je veux que ce soit une fête gustative sous l’eau !
Quel est ton type d’eau préférée pour la pêche à la carpe ?
Eh bien, j’ai justement baptisé l’un de nos modèles d’hameçons OMC en l’honneur d’un lac que j’adore… CASSIEN ! En règle générale, j’aime les eaux où l’on a la liberté de s’exprimer avec différentes approches et techniques, sans être limité. J’aime utiliser la technologie, j’adore être sur l’eau dans un bateau, utiliser un bateau amorceur, et bien sûr j’aime aussi lancer, bref j’aime la variété ! Je suis définitivement plus excité à l’idée de voyager en France et en Europe pour ma pêche que d’aller pêcher au Royaume-Uni. Peut-être parce que cela nécessite plus d’organisation dans un autre pays où vous êtes entouré de différentes cultures. Cela rend la pêche plus spéciale. Et puis j’adore aussi les macarons, donc finalement je peux aller n’importe tant qu’il y a une belle boulangerie à proximité !
De nombreux jeunes pêcheurs viennent directement à la pêche de la carpe sans avoir pêché d’autres espèces et sans aucune « culture » préalable de la pêche. Quels conseils leur donnerais-tu pour bien démarrer ?
Tant de choses ont changé depuis que j’ai commencé à pêcher au début des années 90 ! La pêche de la carpe est tellement accessible maintenant, il est donc difficile de dire à quelqu’un de faire ceci ou cela. Le meilleur conseil que je puisse donner est simplement d’en profiter, de l’aimer, de respecter les autres, de respecter notre environnement et de savourer toutes les bénédictions que l’on rencontre au bord de l’eau… la pêche est plus beau passe-temps au monde !