Le torrent du Vénéon, pêcher sur l'un des joyaux des Alpes

Coulant dans un vallon profond, à la limite entre Alpes du Nord et du Sud, le Vénéon est un gros torrent montagnard qui prend sa source au niveau du glacier de la Pilatte dans le massif des Écrins. Il parcourt ensuite 33km avant de rejoindre la Romanche, en amont du Bourg-d’Oisans à 735m d’altitude. C’est un cours d’eau isérois qui se porte bien, labellisé Rivière en bon état en 2017. Comme beaucoup de rivières qui possèdent un écosystème relativement préservé, le Vénéon est encore majoritairement peuplé par des farios natives. Il fait partie en effet de la douzaine de rivières du département où les truites de souche méditerranéenne ont persisté malgré les alevinages, certainement en raison de son caractère très torrentueux et de sa continuité écologique, perturbée par un seul barrage.

Le Vénéon se caractérise par son régime nivo-glaciaire, avec une période d’étiage hivernal marqué de décembre à mars et des eaux hautes l’été avec des débits naturels qui dépassent les 20m3 /s, pouvant rendre la pêche compliquée. Mais il faut en réalité clairement distinguer deux tronçons puisque le secteur situé en aval du barrage de Plan du lac est en grande partie en débit réservé.

Il faut se déplacer

Le tronçon inférieur s’étend sur une dizaine de kilomètres, de la confluence avec la Romanche jusqu’aux petites «gorges» situées en amont de Bourg-d’Arud. Il est beaucoup plus facile à pratiquer pour des raisons de réglementation (voir encadré), d’accessibilité et de niveaux. Revers de la médaille, la capturabilité y est bien moins forte que sur le tronçon supérieur. Le premier secteur qui va jusqu’à la centrale électrique de Pont Escoffier est visuellement magnifique… mais ils le sont tous à vrai dire ! C’est un lit en tresses remarquable, avec une pente très faible. Les poissons sont bien présents dans les différents méandres mais les caches sont rares et il faut battre du terrain pour réussir. Le secteur suivant, sur 5km, se situe sur la commune de Vénosc. C’est le plus connu et le plus fréquenté car il est longé par la D530 et une contre-allée cyclable. La pente est un peu plus forte et les postes sont davantage marqués. Les niveaux d’eau sont généralement excellents en mars-avril puis plus tard, d’août à début octobre. Toutes les techniques sont alors rentables, notamment le toc-nymphe qui donne de bons résultats surtout quand le Vénéon est clair. La température des eaux, toujours fraîche, et la forte fréquentation pénalisent toutefois la pêche aux leurres durs et il faut s’accrocher pour capturer quelques farios de cette manière. En amont de Bourg-d’Arud se situe le fameux secteur des petites «gorges», ultra-sportif. Ça passe cahin-caha sans corde, rive gauche, mais il faut une très bonne condition physique pour s’y lancer. Il va falloir en effet, pendant six ou sept heures, avaler un dénivelé de 200m sur 2km et se faufiler au milieu d’un chaos d’énormes blocs atteignant parfois la taille d’un immeuble. Dépaysement et émotions vraiment garantis.

Gros scores possibles

Les vasques sont magnifiques et l’agressivité des farios est ici bien meilleure: de gros scores sont possibles. Le vairon, adapté aux eaux creuses bouillonnantes est la technique reine sur cette portion. Quelle que soit la technique, il ne faut pas trop finasser car certains poissons piqués du haut des rochers devront être soulevés d’autorité. Les waders ne sont pas très adaptés, une combinaison est bien plus pratique pour monter sur les blocs. Je conseille aussi de prospecter en binôme pour des raisons de sécurité. Le tronçon amont va jusqu’au hameau de la Bérarde, à 1700m d’altitude. Je n’y ai jamais croisé un pêcheur ! Il faut dire que de mai à octobre, avec un débit naturel toujours au-dessus de 15 m3 /s, le torrent n’est pratiquement jamais traversable. Le toc lourd avec une grande téléblocable de 8 à 10m ou le vairon sont rentables. Il y a beaucoup de poissons à prendre dans des décors à couper le souffle.

À la mouche

 Le secteur de Plan du Lac d’abord est un replat de 1,5km où l’on retrouve des tresses. En no-kill, proche de la route, avec quelques très beaux poissons, c’est le meilleur pour pêcher à la mouche. Commence ensuite un nouveau secteur de gorges assez long, éloigné de la route que je n’ai pas prospecté mais qui semble prometteur. Très sauvage, notamment au niveau des Charviers, il alterne parties plates et zones plus chaotiques avec des éboulements et des caches. Le sentier qui le longe rive gauche permet d’y accéder assez régulièrement. En amont de Champhorent et du pont en pierre des Rajas et jusqu’au hameau des Étages, la route se rapproche et les accès sont moins sportifs. À condition de choisir sa berge, sans essayer de passer de l’une à l’autre, c’est un bon secteur où les blocs et donc les postes sont nombreux. Sur le dernier tronçon, jusqu’au plan du Carrelet, densité et taille des truites baissent. Les très gros rochers sont aussi moins nombreux.

Une vraie merveille

Mais ce véritable bout du monde constitue un excellent camp de base pour le pêcheur-randonneur, au pied de la Barre des Écrins, au sein de la réserve naturelle de la Haute Vallée du Vénéon qui est resté jusqu’à présent un peu en dehors des radars. J’espère avoir convaincu les pêcheurs sportifs et les amateurs de tout-terrain de découvrir cette merveille de l’Oisans.