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Pêche à la mouche du Mutton Snapper, une brute des flats

Il existe sur les flats et dans les chenaux de la zone Caraïbe un poisson aussi beau que puissant, un magnifique combattant que l’on croise parfois en recherchant à la mouche le triumvirat tropical tarpon, bonefish et permit, le superbe Mutton Snapper… Allons pêcher cette brute des flats !

Faisant partie de la grande famille des snappers, le Mutton est l’un des plus gros et aussi des plus colorés. Bien qu’il n’atteigne pas la taille monumentale de son cousin le Cubera, son rapport poids/puissance est juste phénoménal ! Portrait d’une brute chamarrée qui vaut vraiment le coup de ligne. Lutjanus analis de son nom scientifique, notre Mutton fait partie de la famille des vivaneaux en français et snappers en anglais. C’est un poisson de l’Atlantique et il se rencontre des côtes du Massachusetts jusqu’au sud du Brésil. Il est très présent du golfe du Mexique à la mer des Caraïbes, en passant par les Antilles. À maturité, Lutjanus analis mesure entre 28 et 40 cm et peut atteindre presque un mètre pour un poids de plus de 15 kg. Il est facilement reconnaissable grâce à la tache noire entre la ligne latérale et la nageoire dorsale, ainsi que par la jolie ligne bleue sous l’œil. Sa queue et ses nageoires sont orange plus ou moins vif suivant les biotopes. Un véritable poisson d’aquarium ! Il aime vivre sur les récifs et fréquente les chenaux et mangroves.

Les flats bordant des chenaux profonds sont les plus favorables pour rencontrer nos snappers. Ils peuvent regagner les profondeurs à la moindre alerte et aiment longer ces tombants en quête de proies.
Crédit photo : Herlé Hamon

Les chenaux bordant les flats

Dans les chenaux, il vit en groupe et cohabite autour d’une grosse patate corallienne ou d’un récif rocheux, par exemple. Ces endroits se repèrent le plus souvent par des zones plus sombres sur le fond. Il est intéressant de les prospecter à l’aide d’une soie intermédiaire, voire plongeante suivant la profondeur. Il faut alors lancer en direction de ces obstacles sous-marins à l’aide d’un court et solide bas de ligne en 40 lb, par exemple, sur lequel on noue un streamer universel comme le Clouser Minnow monté sur un hameçon 2/0 et fort de fer ! Les mouches blanches et chartreuses ou blanches et bleues sont des classiques qui fonctionnent bien pour cette espèce. Une fois piqué, il va falloir brider très fort pour éviter à notre adversaire de regagner sa cache et donc de couper notre fil. Un 40 lb n’est ainsi pas superflu et permet de mater les spécimens de taille moyenne, ceux entre 2 et 5 kilos environ. Si vous êtes en présence de poissons plus gros, il ne faut pas hésiter à mettre du 60, voire 80 lb, car un Mutton de 7 ou 8 kg est presque inarrêtable à la touche. Dans ce cas, une canne de puissance 10 est un minimum pour le contrer !

Le Mutton est dur à arrêter, en bateau il va chercher à sonder vers le fond pour regagner sa cache dans les rochers ou le corail. Il faut brider fort et prier que le matériel tienne le coup !
Crédit photo : Herlé Hamon

J’utilise du fluorocarbone qui ne dérange pas notre snapper, même en gros diamètre. Il semble cependant sensible à l’acier ou au titane et les captures sont plus aléatoires sur un bas de ligne destiné au barracuda. En effet, ce poisson est un super prédateur capable d’incroyables accélérations par rapport à sa forme tout en rondeur. Il attaque avec une grande violence et se sert de ses grosses canines pour tuer et déchiqueter ses proies. Sa dentition ne laisse d’ailleurs aucun doute sur son régime alimentaire, il s’agit bien d’un carnassier ! Il est en revanche victime de sa haute valeur culinaire et les guides ne le relâchent que rarement… Il est vrai qu’un filet de Mutton bien préparé est juste succulent ! L’espèce n’est pas en danger et les quelques captures faites en pêche sportive ne la menacent nullement.

Voici un très beau spécimen extirpé en force d’une bordure de mangrove.
Crédit photo : Herlé Hamon

Le long des mangroves

On peut le rechercher également spécifiquement le long des zones des mangroves, l’idéal étant des secteurs avec une profondeur d’un à trois mètres au maximum. Il faut alors faire une sorte de « powerfishing », c’est-à-dire lancer à intervalle régulier au plus près des racines et de la végétation pour faire sortir nos snappers. Ce n’est pas une pêche à vue, mais une prospection minutieuse des meilleurs spots. Plus on est précis et proche des mangroves, plus les chances sont grandes.

Les zones rocailleuses comme coralliennes sont aussi très intéressantes pour rencontrer cette espèce qui, encore une fois, y recherche de petits crustacés
Crédit photo : Herlé Hamon

Une soie flottante et un bas de ligne d’une fois la longueur de la canne en fluorocarbone de 40 à 50 lb est alors tout indiqué. Dans des eaux claires, je préfère utiliser des streamers. Encore une fois, une variante de Clouser avec un bon anti-herbe est parfaite. Les grosses imitations de Mantis Shrimp sur des hameçons mer fort de fer en 1/0 et 2/0 et avec toujours un anti-accroche sont aussi très efficaces. Les modèles de la collection EP Flies (Enrico Pluglisi) sont de bons modèles mais, pour cette pêche, il faut les monter sur des TOF SS 1920, Tiemco 600SP ou des Gamakatsu SL 12S. Ce type d’artificielles permet aussi de prendre régulièrement des Grey Snapper qui partagent cet habitat avec les Mutton. Ils sont plus petits, rarement plus de deux kilos, mais vendent aussi chèrement leur peau et vivent en banc ce qui, en général, vous assure plusieurs captures sur un même poste. Comme pour la pêche des chenaux, vous n’avez pas le choix que de bloquer votre adversaire avant qu’il ne regagne l’enchevêtrement protecteur des racines. Lorsque les eaux sont teintées, comme dans certaines lagunes, le popper donne de bons résultats en faisant du bruit en surface ; on attire les prédateurs d’un peu plus loin ! Les poppers en mousse et les « Crease fly » sont parfaits pour cela. Je vous recommande les « Dumbel pop » qui, même en petite taille, font beaucoup de bruit et rameutent les prédateurs alentour ! Cette prospection des palétuviers est à faire surtout sur les gros mouvements d’eau, c’està-dire en milieu de marée descendante et surtout montante. Contrairement au Snook qui est à pêcher à marée basse, le Mutton n’aime pas rester dans très peu d’eau.

Voici une zone parfaite pour rencontrer notre beau snapper, un chenal profond bordé de mangroves et de flats d’herbe à tortue, tout est réuni !
Crédit photo : Herlé Hamon

Sur les flats

Sur les flats, on le rencontre le plus souvent en solitaire ou en tout petit groupe. Il affectionne les zones de bordure entre les hauts-fonds et les tombants. Son régime alimentaire assez éclectique l’amène à rechercher crabes et crevettes tout comme le fait le bonefish. Cependant, il attaque volontiers une boule de sardines ou de petits poissons rassemblés sur un haut-fond et peut même chasser de plus grosses proies. J’ai vu de gros spécimens sortir de nulle part pour avaler un snapper de quinze centimètres qui avait gobé ma crevette, pas de pitié ! Il aime les fonds recouverts d’herbe à tortue et ne monte que rarement sur les flats de sable blanc. Il peut faire du tailing, même si cela est rare, car il apprécie d’avoir un peu d’eau au-dessus de la tête. Dans ces conditions, il devient méfiant et sa capture est toujours un superbe coup de ligne. Il n’est pas très regardant sur les mouches, une crevette ou un crabe passant dans son champ de vision sont normalement interceptés. En général, nous pêchons beaucoup plus fin que dans les cas de figure évoqués ci-dessus. En soie de 8 et avec un bas de ligne en 12 livres, le combat n’est pas le même ! Nous ne pouvons pas contrer le départ du poisson et il faut espérer qu’il n’y ait pas trop d’obstacles sur le flat, car cette espèce les recherche systématiquement… Notre Mutton va essayer de regagner les zones plus profondes, voire le tombant du flat. L’enjeu est donc d’arriver à freiner suffisamment les premiers rushs pour réussir à le capturer. Vous aurez alors réussi un des plus beaux coups de ligne que l’on puisse faire sur un haut-fond des Caraïbes. Le Mutton Snapper n’est pas très connu et encore moins recherché par les moucheurs en mer. Pourtant, il représente un incroyable trophée au fouet.

Mon ami Jean-Paul avec un spécimen de taille moyenne qui pourtant lui a presque arraché la canne des mains à la touche !
Crédit photo : Herlé Hamon

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