Avec ses 73 km, classés en 1re catégorie, et un bassin-versant de plus de 500 km2, difficile de passer à côté du Trieux. Paradoxe, sur cette rivière à haute valeur salmonicole, il n’y a qu’un guide professionnel qui officie. Un « local » comme aiment à dire les Bretons, qui la connaît parfaitement de sa source à son estuaire. C’est peu dire ! Car même à prendre un mois de vacances, canne à mouche en main, il serait vain de penser pouvoir découvrir toute la diversité de son linéaire. Des hauteurs du Centre Bretagne jusqu’au domaine maritime, soit des environs de Saint-Connan jusqu’en aval de la pittoresque petite ville de Pontrieux, à l’écluse de Goas Vilinic précisément, le Trieux offre une grande richesse de parcours. Donc rendez-vous pris avec Éric Hamon, le fameux guide, qui est aussi une figure du Léguer et du Leff deux autres rivières de renom. Notons que le Leff, rejoint le Trieux pour former un estuaire qui est un des plus préservés de Bretagne. Il rejoint la Manche, en face de l’île de Bréhat, au terme d’une vallée maritime de 18 km. Amateurs de pêche au bar à la mouche… Mais là n’est pas notre sujet.
Prospection en mouches noyées
En cette belle journée, le temps nous est compté, et Éric s’est mis dans la tête de nous faire découvrir les meilleurs secteurs avec ce recul de trente années de pêche sur ce Trieux qui ont forgé son expérience. Quand un Breton a une idée fixe ! C’est dans le sens du courant que nous allons aborder cette balade halieutique au rythme de nombreux ponts qui jalonnent ce fleuve côtier et d’arrêts sur image. Tout en amont, s’il prend sa source sur la commune de Kerpert, il n’est alors qu’un ruisseau qui va rapidement gonfler avec l’apport de nombreux affluents. Il faut prendre pour point de repère l’étang Neuf et sa digue construite au xiie siècle par des moines que l’on savait déjà habités du génie hydraulique, pour commencer à s’intéresser à sa prospection. En aval de cette digue, le Trieux prend des allures de rivière et s’écoule au milieu de prairies humides. « C’est un bon secteur de début de saison. Les postes y sont marqués et les truites sont plutôt bonnes filles et nombreuses. Dès l’ouverture, la mouche noyée est efficace et ce jusqu’au deuxième printemps « Never Amzer » en breton, lorsque l’eau se réchauffe et les chênes se couvrent d’un vert tendre. Même si cette pêche est tombée un peu en désuétude, et c’est bien dommage, il faut rappeler que le Trieux, par son profil, se prête admirablement bien à cette technique que pratiquaient nos anciens avec talent. Une longue canne et un train de trois mouches s’avèrent très efficaces quand on sait lire l’eau. Plus tard en saison, une canne courte de 7,5 à 8 pieds pour soie de 4 ou 5 fait merveille pour pêcher les gobages » explique notre guide.
Méandres et pâturages
Nous rejoignons ensuite la D787 qui relie la ville de Guingamp à celle de Corlay. Elle longe le Trieux qui pénètre progressivement dans une vallée de caractère, boisée et escarpée. La route offre de nombreux accès notamment jusqu’au pont Galliou (route de Saint-Adrien) même s’il n’est pas toujours simple de se garer. Large d’une dizaine de mètres, le Trieux sinue paisiblement dans des pâturages et roule ses eaux couleur thé sur un lit de sable et de gravier. La densité de truites est satisfaisante, elles sont de taille plutôt modeste sur ce secteur, la qualité de pêche n’en est pas moins bonne à travers un joli paysage pastoral. Selon les conditions, sèche, nymphe au fil ou montage espagnol et noyée permettent de varier le menu et les approches. Petit saut de puce par la route au niveau du pont Galliou qui marque une nouvelle réglementation expérimentale qui a remplacé le parcours mouches par un parcours dit de « fenêtre de capture », autrement dit où la taille de conservation doit être comprise entre 23 et 28 cm et seules 2 truites peuvent être prélevées afin de préserver les géniteurs. Hameçon simple sans ardillon, toute technique autorisée. Ce parcours expérimental s’étend jusqu’au pont de Squiffiec, c’est-à-dire à l’aval de la ville de Guingamp au niveau de la D32.
En avanl de Guingamp
De Saint-Péver à Guingamp, la rivière s’élargit pendant 12 km. Deux affluents, le Sullé et le ru du Bois de la Roche viennent successivement la rejoindre. Son profil est particulièrement varié avec une suite de biefs de radiers sablonneux et de profonds parsemés de blocs granitiques, d’obstacles naturels et d’embâcles ; vieux déversoirs et ruptures de pentes qui sont autant de postes à beaux poissons. Après avoir longé la D767, le Trieux borde le bois de Kérauffret et opte pour un caractère sauvage. Une halte s’impose au niveau du moulin de Kerlosquer. Le secteur du pont Caffin, au niveau de Bourbriac, est probablement le moins plaisant à pêcher, visuellement il s’entend, car c’est un secteur périurbain avec des friches industrielles même si de belles truites y ont élu domicile et montrent discrètement leur « museau » le temps d’un coup du soir. « C’est en aval de Guingamp que j’aime particulièrement guider mes clients en recherche de sensations fortes. Je ne compte plus les truites de 40 et plus que j’ai pu y capturer. La rivière donne toute sa mesure, à mon sens, notamment entre Pabu, Trégonneau et le pont de Squiffiec puis entre Saint-Clet jusqu’en amont de Pontrieux. L’occasion d’emprunter l’ancienne voie romaine qui dessert les moulins de la vallée dont il reste 22 témoignages même si la plupart sont aujourd’hui des habitations privées. C’est une caractéristique de ce long secteur marqué par de longs biefs calmes, “stand” en breton, et des zones d’accélération de courant. Les belles truites y trouvent refuge et cohabitent dans les fosses avec le saumon et les truites de mer en saison. Je ne commence à les pêcher généralement qu’à partir de mai dès que les insectes sont suffisamment présents. Il faut souligner qu’il reste une belle diversité entomologique, du plécoptère, au sedge en passant par les olives (Serratella ignita), les diptères qui compliquent souvent la situation et les terrestres. »
Les saumons aussi !
De Pontrieux à Pont-Locminé, en Saint-Péver, ce ne sont pas les pools et trous à saumon qui manquent. Le Trieux a toujours été une rivière à saumon réputée. Ce n’est pas le père Le Gall qui venait à vélo prospecter les courants avec sa fameuse mouche en laine orange et hackle gris, qui nous contredirait. La grande époque est certes révolue. Le Tac autorisé est de 31 saumons de printemps et 240 castillons (saumon d’été).
Une rivière à gros poissons
« Sur ces grands plats, il faut bien sûr s’armer de patience. C’est une pêche d’observation attentive où il ne sert à rien de fouetter dans tous les sens en pêchant l’eau. Il ne faut pas négliger un godage discret en bordure, c’est souvent la signature d’une truite de 35 cm et plus et il se prend parfois des 50 cm à ce petit jeu. C’est surtout à la période de la mouche de mai que les plus grosses truites perdent de leur méfiance. En journée, sur des émergences d’Ephemera danica et le soir sur les retombées de spents blancs. Le Trieux reste une rivière à gros poissons », explique Éric en fin connaisseur de sa rivière. Plus tard dans l’été, les truites se déplaceront en aval des déversoirs là où elles trouvent des courants oxygénés. Certaines années, sur la partie basse de la rivière, en aval du moulin de la vache, les remontées d’aloses, dès le mois de mai, peuvent offrir un sport intéressant tout comme les truites de mer qui se laissent bien souvent leurrer avec de petites mouches. C’est en aval de la très jolie ville de Pontrieux, qui vaut largement le coup d’œil, avec ses très nombreux lavoirs restaurés et ses belles maisons en pierre taillée, que le Trieux devient saumâtre. Le barrage de Goas Vilinic est le point d’entrée d’un estuaire long de 18 km, un magnifique espace naturel qui trouve son exutoire à Loguivy de la mer. L’occasion de goûter aux joies du Kayak et de la pêche du bar à la mouche. C’est dire si Éric Hamon a plusieurs cordes à son arc. Kenavo ar c’hentañ !
Informations utiles
Éric Hamon, guide pêche
http://erichamon.blogspot.com
Tél. : 06 31 11 61 61
Fédération départementale de pêche des Côtes-d’Armor
http://www.federation-peche22.com
7, rue Jean Rostand
22440 Ploufragan
Tél. : 02 96 68 15 40
AAPPMA du Trieux-Guingamp
http://aappmadutrieux.com
Tél. : 06 85 20 35 16 1
AAPPMA de Pontrieux
http://aappmapontrieux.centerblog.net
Tél. : 06 82 48 66 55 18