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Nicolas Rabant : peintre, sculpteur et surtout pêcheur

L’artiste en train de faire chauffer à 35°C maximum une caudale de thon en bronze pour lui mettre une fine couche de cire d’abeille, afin de l’isoler de l’air et de l’humidité ambiante. 

Crédit photo Thierry Sauvin
La pêche, en mer ou en eau douce, est sa source d’inspiration ! Nicolas Rabant développe une pratique artistique originale, dans laquelle sa passion halieutique transpire à grosses gouttes. C’est au bord de l’eau qu’il puise son énergie et fait émerger de nouvelles idées, matérialisées en peinture ou en sculpture…

Lumineuses, ses peintures reflètent son lien indéfectible avec sa région d’adoption, la Bretagne ! Nicolas s’inspire de ce que la mer lui apporte à chaque marée pour composer peintures et sculptures. C’est lors de l’exposition de ses œuvres à la Passerelle de Brest, centre d’art contemporain, que nous nous sommes rencontrés. En fait, c’est parce que chacune de ses peintures porte un nom de leurre que nous avons pu faire connaissance… Et pour tout dire, la prise de contact fut rapide et enrichissante. Depuis, une belle amitié halieutique nous lie. Ces noms sont empruntés à la gamme de poissons-nageurs Orion d’Éric Le Guyader. « Quand je vois ces leurres, je suis doublement touché, par le prisme du pêcheur et celui de l’artisan. Lui comme moi utilisons les paillettes comme matériau, celles-ci sont d’ailleurs inscrites dans l’histoire de l’art contemporain. » Avec vue sur la rade de Brest, son atelier reflète parfaitement le personnage. À l’intérieur se mêlent ses œuvres et son matériel de pêche, qu’il bichonne… « Cannes, leurres et mouches côtoient peintures et sculptures dans un désordre organisé », plaisante-t-il.

Nicolas ne manquerait pour rien au monde l’ouverture de la pêche de la truite. C’est un moment convivial propice à de belles rencontres… L’échange, le partage, c’est le sel de la vie !
Crédit photo : Thierry Sauvin

Au fil des rencontres !

Né à Paris en 1988, Nicolas fit ses premiers pas au bord de l’eau à l’âge de 5 ans. Les vacances en Bretagne laissèrent des traces indélébiles, surtout après la découverte de l’estran et de ses petits habitants. Puis, les sorties en bateau en famille et avec les amis n’ont fait que confirmer cette appétence pour la pêche. Cette passion est le fruit de rencontres… Avant son arrivée à la cité du Ponant, Nicolas vivait en région parisienne à Marly-le-Roi. Il était aide-soignant au bloc opératoire de l’hôpital de Garches, dont le chirurgien était passionné de pêche. Entre deux interventions, iI lui parlait de techniques et de voyages en Irlande… Mais c’est surtout son ami d’enfance et compagnon sur l’eau, Paul, chercheur en biologie halieutique, qui lui a véritablement donné l’envie de s’installer en bord de mer. Son premier bar, Nicolas l’a pris en 2014, avec Paul, au phare du Petit Minou, situé à l’entrée du goulet de la rade de Brest. Puis, sous les conseils avisés de son ami Éric Toutain, kinésithérapeute, il a découvert la pêche du bar au leurre de surface. Entre-temps, Nicolas a fait ses études à l’école des beaux-arts de Brest. En fin de journée, il allait tremper le fil à l’eau dans la rade à la recherche des céphalopodes, seiches et calamars. En 2018 il obtient avec brio son diplôme.

Nicolas et les calamars, c’est toute une histoire ! C’est grâce à eux qu’il a pris goût à la pêche… Derrière lui, son exposition à la Passerelle, centre d’art contemporain de Brest. 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Nicolas, le sculpteur

Les céphalopodes, calamars et seiches, sont largement représentés dans ses œuvres. Pourquoi ? « Lors de mes études aux beaux-arts, j’allais presque quotidiennement chatouiller les calamars avec une turlutte. Quel bel animal! Ce sont ses yeux, d’une grande clarté, qui m’ont subjugué », précise-t-il. Nicolas se sent un peu redevable à leur égard… Il apprécie leur chair mais avant les agapes, il prend soin d’en faire une empreinte pour leur donner une autre vie… Depuis peu, il fait de même avec les caudales de thons rouges.

Trio de seiches réalisé à partir d’une empreinte et posé à même le sol… Une sculpture ne peut pas être accrochée au mur. Ce n’est aucunement un trophée ! 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Toutes les pêches

Depuis, Nicolas pêche environ deux fois par semaine et en toute saison ! En mer, il est subjugué par l’attaque d’un bar en surface… « Que d’émotions de le voir suivre puis attaquer le leurre. » Cela étant, il ne dédaigne pas le rechercher aussi au lançon en début de saison. Lieus, juliennes, turbots et saint-pierre font également partie de son répertoire. « Aux appâts naturels, ce sont d’autres sensations et émotions à vivre. » Nicolas apprécie la pêche en surfcasting, notamment pour séduire les dorades royales de la rade. Et, depuis peu, il a goûté à la pêche du sar en iso fishing, une technique où le pêcheur et le poisson sont en lien direct compte tenu de la quasi-absence de plomb. Si toutes les pêches l’intéressent, Nicolas est, depuis le grand retour du thon rouge en Bretagne, mordu par cette pêche qu’il pratique au vif et au leurre sur chasse avec son ami Éric. Notre peintre fréquente aussi l’eau douce depuis trois ans. Il traque la truite au toc et au leurre. Et puis, il fallait s’en douter, son penchant naturel pour la créativité l’a amené à découvrir récemment la pêche à la mouche tant en mer qu’en eau douce… Ce fut le coup de foudre ! « Si les arabesques de la soie y ont contribué, ce sont surtout les perspectives de créer des mouches artificielles qui m’ont séduit. Et là aussi, le champ des possibles est infini… »

Nicolas a depuis peu goûté aux plaisirs du montage de mouches… Gare à l’addiction ! 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Un besoin vital

Pour Nicolas, la pêche, ce n’est pas uniquement prendre du poisson. C’est son jardin secret. « La pêche me donne envie de créer. » C’est, pour lui, un moyen de faire des rencontres et de nouer des relations dans la durée. « Ces rencontres, le plus souvent improbables, sont possibles car tous partagent une même passion, la pêche. » À l’écouter, je repense au film réalisé par Robert Redford Et au milieu coule une rivière, au sein duquel deux frères, que tout oppose, ont su conserver un lien fort grâce à la passion halieutique. La pêche, c’est aussi un formidable terrain d’observation de la faune et de la flore. « C’est à la base même de ma démarche… », explique-t-il. Nicolas s’émerveille devant le vol furtif d’un martin-pêcheur ou la stature d’un héron cendré…

Un pêcheur heureux d’avoir fait la connaissance avec une truite arc-en-ciel, truite qui a succombé à l’un de ses streamers maison. 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Nicolas, le peintre

« Ma peinture est intuitive et se construit quasiment seule. Je réalise, dans un premier temps, un fond sans trop d’intentions qui deviendra une peinture en tant que telle, par surprise », explique Nicolas. Ces œuvres se forment par une succession de monochromes avec une forte intensité lumineuse. Une première couche donne le ton de la toile (vaporisation suivie d’un temps de repos). Puis, plusieurs couches successives se superposent jusqu’à la réalisation du motif. « Ce ne sont pas des toiles de décoration mais des décors. Ce sont des peintures non figuratives, dans le sens où elles ne se réfèrent pas à des endroits particuliers. Libre à chacun d’imaginer ce qu’elles représentent. Chacun a sa propre interprétation, de l’ordre du souvenir », précise Nicolas. Du bleu océan à l’orange du coucher de soleil… C’est un peu comme si on prenait un bain de lumière grâce aux scintillements qu’émettent ses peintures.

Une sculpture de calamar en bronze. Derrière, une toile appelée « Cubera », célèbre popper au ton rose orangé d’Éric le Guyader, dont la couleur rappelle que les calamars sont particulièrement actifs au lever et au coucher du soleil…
Crédit photo : Thierry Sauvin

Un pêcheur responsable

En tant que pêcheur et cueilleur de champignons, Nicolas se considère comme acteur responsable dans un environnement malheureusement fortement dégradé. Pour responsabiliser davantage les pêcheurs, il n’est pas hostile à un permis mer, assorti à une formation de pêcheur responsable. Il est pour l’extension du principe des fenêtres de capture, tant en eau douce qu’en mer… L’artiste n’est pas pour autant un adepte du no-kill intégral. Certes, il remet à l’eau la plupart de ses prises mais aime en garder certaines pour les cuisiner et les partager avec ses amis. Cependant, pour chaque prise gardée, il essaie dans la mesure du possible, de connaître l’histoire de son poisson. Il conserve les otolithes des bars lui permettant de connaître leur âge…

Nicolas au Grau-du-Roi en 1992, ravi de tremper le fil à l’eau… Si la Camargue l’a marqué, c’est en Bretagne qu’il a jeté l’ancre ! 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Multiplier les rencontres

Des projets, Nicolas en a plein la tête ! Il envisage de créer une résidence (atelier) et un workshop (animations et découvertes), en s’inspirant de la série télévisée Fishing with John de John Lurie, qui est musicien, acteur et peintre. L’objectif est d’inviter des artistes qui ne savent pas pêcher, à goûter à cette activité de pleine nature et ainsi de faire connaissance. « C’est pour moi un moyen de faire de la recherche, d’explorer de nouvelles approches artistiques par le biais de rencontres. Et puis, l’important est d’être au bord de l’eau, qu’elle soit douce ou salée, et surtout, en bonne compagnie… » aime-t-il à préciser avec délectation.

Son atelier est à son image : un mélange de tableaux, de sculptures et de leurres… L’esprit de la création !
Crédit photo : Thierry Sauvin

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