Février est le seul mois de l’année où je ne sors pas sur l’eau pour pêcher. Je profite de ce temps disponible pour réaliser un inventaire du matériel, le ranger et le remettre en condition optimale. Cela passe par une bonne révision du parc des moulinets ! Ces derniers assurent l’enroulement du corps de ligne ainsi que sa sortie. Leur système de freinage est un allié plus que précieux pour combattre nos plus grands poissons d’eau douce. En définitive, nos moulins sont des éléments clés pour garantir la réussite d’une session. À chaque sortie, eau, poussière, sable, terre et bien d’autres éléments potentiellement abrasifs viennent au contact et s’insinuent dans nos précieuses mécaniques. Je n’attends pas qu’un moulinet me donne des signes d’encrassement ou de fatigue pour m’en occuper. Pas d’inquiétude, nul besoin d’être un as de la mécanique (heureusement pour moi d’ailleurs) pour prendre soin de ce matériel. Un peu de méthode, d’organisation, et quelques outils sont suffisants.
Quatre points clés
Lors de cet entretien complet, je me concentre sur quatre points clés : la bobine, le frein, le galet de pick-up et enfin la pignonnerie interne. Avant de démonter quoi que ce soit, j’attaque par un nettoyage général du bâti, de la manivelle et de la poignée, à l’aide d’un chiffon et d’une eau légèrement savonneuse. Ensuite, j’extrais la bobine de son axe en dévissant le bouton de frein puis je dégage le système de freinage. À l’exception de certains modèles comme le Spinfisher de Penn, le système de freinage est constitué d’un empilement de rondelles logées à l’avant de la bobine et maintenues en place soit par un petit circlip, soit par une couronne de maintien qu’il suffit de dévisser. Pour le circlip, il faut le retirer à l’aide d’un petit tournevis plat de précision ou d’une pointe à tracer. Attention, car ce petit élément a le don de jaillir comme un diable de sa boîte et de disparaître dans les recoins de votre poste de travail.
La bobine
Une fois l’opération réalisée, je poursuis le nettoyage de la bobine sur laquelle s’accumulent énormément de saletés ramenées par le corps de ligne. En général, je profite de cette opération pour changer ou retourner mes tresses. Une bobine vide facilite son nettoyage et je n’hésite pas à la passer en entier dans un bain d’eau savonneuse avant de la rincer à l’eau claire et de bien la sécher avec un chiffon doux. Les propriétaires d’un compresseur pourront même utiliser l’air comprimé pour chasser les dernières molécules d’eau en fond de rainures.
Le frein
Les systèmes de frein par friction sont composés d’un empilement alterné de rondelles en acier et en feutre ou en carbone. Surveillez la couleur des disques en feutre qui doivent être blanc crème ou légèrement colorés par la graisse. Leur usure se caractérise par un aspect marron dû aux échauffements significatifs et répétés lors des combats. Si cette teinte est prononcée, il sera nécessaire de procéder à un remplacement du disque. Pour répartir l’usure des composants de frein, j’intervertis chaque année la place des disques en feutre en plaçant ceux du haut en dessous et vice-versa.
La juste mesure de graisse
Pour assurer une bonne fluidité du frein, là encore élément clé pour la bonne maîtrise d’un combat, les feutrines doivent être légèrement graissées, mais surtout pas trop ! C’est peut-être l’étape qui m’a demandé le plus d’ajustements. J’avais tendance à mes débuts à avoir la main trop lourde sur la quantité de graisse. Quant aux disques en carbone (Carbontex), plus résistants dans le temps, je surveille simplement leur structure en vérifiant qu’ils ne soient pas déchirés ou complètement défibrés. Leur capacité de freinage par friction est très grande, ce qui peut rendre le système plus saccadé lorsque l’on cherche de grandes puissances de frein. Pour fluidifier le système, je les humecte de graisse très légèrement et je veille à retirer l’éventuel surplus. Je graisse également le joint et le dessous du bouton de frein, afin de préserver sa souplesse et de renforcer son étanchéité, la graisse étant hydrophobe.
Le galet de pick-up
Je dévisse ensuite le cache latéral situé sous le bras du pick-up et je remplace la graisse poisseuse usagée du ressort d’armement de l’arceau du pick-up par de la graisse propre, afin d’assurer son bon fonctionnement. Pour toutes les opérations de lubrification ou de graissage, quelle que soit la pièce, je ne mets surtout pas du propre par-dessus du sale. Je nettoie d’abord et dégraisse à l’aide de white-spirit, puis je sèche, avant de déposer la graisse propre. Le galet de pick-up est un petit élément qui peut paraître anodin. Pourtant, c’est une pièce qui encaisse de grosses contraintes mécaniques et de nombreuses saletés avec le passage et les frottements de la tresse. Une fois démontées en entier, les pièces ont droit à un petit bain rapide de white-spirit. Après un séchage minutieux au Coton-Tige (en prenant soin de ne pas laisser des fibres de cotons sur mes pièces), je remonte le tout en lubrifiant le roulement avec deux gouttes d’huile que je dépose grâce aux embouts de précisions des flacons spécifiquement dédiés.
La pignonnerie interne
Place enfin à l’entretien des engrenages principaux du mécanisme de bobinage. Par chance, les moulinets pour la pêche du silure sont des machineries robustes et rustiques. Il nous suffit donc simplement de dévisser le carter pour avoir accès à la roue de commande, à la vis sans fin et à la pignonnerie. Le processus est le même que pour le galet de pick-up. Pour ces pièces, un dégraissage complet au white-spirit finalisé au chiffon doux, suivi d’une petite phase de séchage que l’on pourra encore accélérer avec de l’air sous pression. Une fois les pièces bien sèches, je remonte soigneusement le tout en graissant chaque élément. Voilà enfin le moment de tout remonter. Lors de cette opération, je dépose deux gouttes d’huile sur tous les roulements : une ou deux sur la roue de commande, sur la vis sans fin, au niveau de l’antiretour, sur l’axe, dans les articulations de la poignée de la manivelle. En ce qui me concerne, rien n’est plus agaçant en action de pêche qu’une poignée de moulinet qui grippe, couine ou croustille à la récupération. Heureusement, m’en voici a priori prémuni pour la saison qui arrive !
Outillage
Entretenir ses moulinets ne demande pas un équipement de spécialiste. Quelques tournevis de précision, des cure-dents ou piques à brochettes pour décrasser les rainures sans avoir l’agressivité du métal contre métal, des Cotons-Tiges, des chiffons doux et microfibres. Il faut aussi de l’eau savonneuse et du white-spirit pour nettoyer, un solvant doux spécifiquement dédié à cet usage, de l’huile de vaseline et de la graisse spécifiquement conçue pour lubrifier les moulinets de pêche.