Le rendez-vous était pris depuis long temps avec Jérôme Triquet, l’ayant mis au défi de le voir capturer quatre espèces du bord – brochet, perche, black-bass et chevesne – au cours d’une seule et même sortie. Nous nous retrouvons donc au barrage de Savières, à 500 m du centre de Chanaz (73) , l’un de ses spots favoris. À la jonction entre le canal et le vieux Rhône, il prévoit de lancer ce beau challenge avec le brochet. La météo est avec nous car après une nuit pluvieuse, le ciel semble dégagé, augurant une belle journée. « Août et septembre sont en général très favorables ici, rappelle Jérôme. Il y a un chenal creusé par le courant de la chute. Il faut laisser descendre et pêcher creux, bien dans l’axe, c’est souvent là que les becs se tiennent. »
Moins de 30 minutes
Il ne croit pas si bien dire car après quelques passages infructueux en casting, au shad à palette, il pique déjà un premier brochet avec un swimbait articulé de 15 cm. Le poisson est vite ramené et mis à l’épuisette. Verdict : 70 cm. Pas un monstre mais un joli poisson. Jérôme, concentré, limite tendu jusque-là, peut se détendre : en moins d’une demi-heure, il vient de régler la question du brochet. Direction, donc, le contre-canal, 300 m plus loin, pour l’opération chevesne. Jérôme passe sur un ensemble spinning, bien plus léger. Il mise sur une petite créature flottante pour faire craquer les meuniers, très actifs en surface à cette période. Il s’approche du pont à pas de Sioux et repère trois jolis spécimens maraudant à la sortie de la buse.
Un aimant à chevesnes
Connaissant ce parcours, je sais que les poissons postés ici sont toujours difficiles à prendre car les touristes les dérangent constamment. Il est normalement préférable de prospecter plus haut dans le canal, où ils sont plus tranquilles. « J’ai confiance, me dit Jérôme. Le Notobug de Sakura est un aimant à gros chevesnes, surtout avec le coloris qui imite un gros bourdon. Je l’ai constaté à maintes reprises sur le Fier ! » Je reste sceptique mais je m’incline car, à peine la créature touche-t-elle l’eau, qu’un des poissons se retourne et vient lentement cueillir l’offrande. Jérôme décoche alors un ferrage appuyé… peut-être même trop puisque le chevesne n’est pas piqué. Seconde tentative… Un des poissons monte à son tour. Cette fois, dûment averti, notre Haut-Savoyard attend que le poisson referme sa gueule pour ferrer… mais encore raté ! Un peu sous pression, dépité, Jérôme tente à nouveau le coup là où j’aurais peut-être abandonné. Par chance, en ce début de matinée, et sans doute en raison de la pluie de la nuit passée, les chevesnes sont déchaînés. Et le plus gros des trois aspire lui aussi le leurre. Jérôme le laisse cette fois carrément redescendre avant de ferrer et là, enfin, celui-ci est piqué. Après un rush initial impressionnant mais maîtrisé, le poisson est pris : 49 cm, un vrai gros du contre-canal. Et de deux ! Nous gagnons maintenant le village pour pêcher le fameux canal de Savières, très original avec son débit soutenu et ses eaux d’une extrême limpidité.
Leurre fétiche
Jérôme se positionne d’entrée dans un virage. « Le courant est ralenti et c’est la partie la plus caillouteuse, précise-t-il. Les perches s’y tiennent régulièrement mais elles sont souvent petites ici. » La stratégie est bien rodée : il commence par un petit shad à palette, son leurre de base (voir encadré) pour faire sortir les poissons avant de les harceler avec un petit souple. Et ça marche, les eaux claires permettent de voir les perches attaquer. La première est vraiment petite mais la seconde passe les 20 cm et nous avions fixé un objectif de diversité, pas de taille. En moins d’une heure et demie, Jérôme a déjà presque réussi son beau pari. La fraîcheur de la matinée ayant laissé place à un beau soleil, Jérôme profite de cette petite pause pour quitter le sweat-shirt et le pantalon et passer en mode été. Il nous suffit de traverser le pont du canal pour rejoindre le plan d’eau artificiel des Îlots de Chanaz. Cette petite pièce d’eau à vocation touristique, envahie par les herbes et peu profonde, abrite quelques jolis black-bass… surpêchés ! Bien en retrait de la berge, notre champion scrute la surface à la recherche d’une silhouette sombre.
Un de plus
Pas de poisson repéré mais tentative tout de même, au popper, au niveau du ponton à pédalo. Aucune activité. Au fond du plan d’eau, où la profondeur est la plus faible et la végétation très dense, Jérôme pense avoir plus de chance. Très concentré, il peigne une à une les structures des bungalows sur pilotis et le moindre herbier. Aucune touche, c’est le premier échec de la matinée ! « Avec la pluie de cette nuit, les eaux se sont rafraîchies, les black-bass ne sont donc pas très actifs surtout en surface, analyse Jérôme. Il me semble toutefois en avoir repéré un beau. Revenons plus tard quand le soleil sera au zénith… » En repassant sur le canal, Jérôme, insatiable, ne peut s’empêcher de capturer un chevesne repéré juste en face des terrasses. Nouvelle tentative sur les perches et trois nouveaux poissons sont attrapés, au petit shad à palette, mais la barre des 25 cm n’est pas atteinte. Il est temps de se restaurer le long des berges herbeuses du contre-canal où Jérôme ne peut résister, en plein milieu du casse-croûte, de leurrer un second gros chevesne qui passait par là. Après le déjeuner, deux nouveaux meuniers de plus de 45 cm s’ajoutent au compteur.
Double échec
Le soleil tapant fort maintenant, il est temps de retourner tenter les black-bass. Notre stratège file directement à la queue de l’étang. Choix payant puisqu’au deuxième lancer, un bolide sorti des herbiers attaque rageusement le popper. Surpris, Jérôme rate le poisson qui n’est pas piqué. Changement de leurre pour une frog et nouvelle attaque d’un autre joli spécimen qui se décroche au bout de quelques secondes. Le temps fort est passé et, malgré toute son insistance, il n’arrivera pas à déclencher d’autres attaques. Retour donc à notre point de départ, en aval du barrage, pour essayer de prendre un brochet plus gros que celui du matin. C’est au jerkbait que Jérôme, à l’aise avec n’importe quel type de canne et de leurre, tente sa chance. Il lui faut moins de dix lancers pour prendre un second brochet, hélas tout juste maillé… Bien loin de la barre symbolique des 90 cm, synonyme de gros poisson pour lui.
A portée de canne
Nous repartons vers le village qui, en cette fin de journée, retrouve sa tranquillité. L’occasion d’aller gratter sous les pontons en bois du canal. Une petite perche se dévoue…. Jérôme qui ne veut pas s’avouer vaincu, fait une dernière tentative black-bass, sans succès. « Mon erreur, c’est d’avoir utilisé la même canne que pour les chevesnes, beaucoup trop souple, avoue Jérôme. À force de changer de leurres et de spots, j’ai manqué de lucidité ! » Jérôme s’en veut d’autant plus qu’il avait le matériel adapté dans sa voiture et que le pari était donc à portée de canne, le spot de Chanaz ayant tenu ses promesses. Allez, on ne lui en voudra pas plus que ça, la journée fut tout de même sacrément belle !
Son matériel
BROCHET
- Canne : Iconic ICC 742 XXH (Sakura)
- Moulinet : Wombat 65 PWR (Sakura)
- Tresse : Power Pro 19/100
- Pointe : Fluoro Leader (Sakura) 94/100
CHEVESNE
- Canne : Iconic ICS 682 ML (Sakura)
- Moulinet : Rarenium Ci4 (Shimano)
- Tresse : Sensibraid 4X (Sakura) 12/100
- Fluoro : Eaux Vives (Pezon & Michel) 25/100
PERCHE
- Canne : Ionizer 702 M (Sakura)
- Moulinet : Tsubaki 1007 FD (Sakura)
- Tresse : G-Soul Egi-Metal (YGK) 15/100
- Fluoro : Eaux Vives (Pezon & Michel) 20/100