Cette catégorie piscicole est généralement délaissée par les pêcheurs à la mouche français, et pour cause. Notre mode de pêche a historiquement un attachement très fort à la traque des salmonidés et plus particulièrement celui de la truite fario. Afin de protéger au mieux cette espèce sensible, il a été mis en place en France (comme dans un très grand nombre de pays), le système des catégories, qui permet de gérer différemment les eaux à dominante salmonicoles, où l’on retrouve les truites, la première catégorie, et les milieux cyprinicoles où vivent les « blancs » et les poissons de la même niche écologique, la seconde catégorie. De ce fait, nous avons une habitude certaine à pêcher les rivières de première catégorie pour chercher les truites sauvages et de délaisser les espaces de seconde, selon la littérature, délaissés par ces dernières, dès que la fermeture de la première catégorie piscicole a sonné.
Les temps changent
De nos jours, et même si un prélèvement raisonné s’entend et se respecte parfaitement, la pression de pêche à vocation alimentaire a énormément diminué au profit d’une pêche de loisir plus assidue et d’une pratique du no kill bien plus généralisée. De ce fait un système de protection des salmonidés tel qu’il se pratique historiquement n’a plus sa valeur d’antan, et bénéficie certainement plus à la protection globale du milieu qu’à la seule préservation de la truite fario. Certaines fédérations, où la pêche de la truite est fortement pratiquée par ses adhérents ont bien pris conscience de ce phénomène et cherche à développer leur offre afin de prolonger la saison des passionnés. Durant un peu plus de deux décennies, la seule alternative à la fermeture de la première catégorie était la pêche en réservoir. Beaucoup de ces domaines d’eaux closes étaient privés mais certaine fédération se sont inspirés de ce système de gestion pour l’adapter à des plans d’eaux fédéraux. La fédération de pêche de la Loire a créé dans cette dynamique les réservoirs d’Usson en Forez et de Noirétable.
Quatre parcours en Loire
Forte de cette expérience et de son succès, la fédération de pêche de la Loire a soutenu ses Aappma (Association Agrée pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique) pour le développement de parcours type réservoir, mais en rivière de seconde catégorie.
Le Furan
Le Furan a été l'objet de cette expérience. Cette rivière, prenant sa source dans le Parc naturel régional du Pilat, et se jetant dans le fleuve Loire en rive droite sur la commune d’Andrézieux Bouthéon, était par le passé (un passé extrêmement récent) la rivière dans lequel se déversait l’intégralité des eaux usées de Saint-Étienne. Il était donc un véritable égout à ciel ouvert, où aucune vie piscicole ne pouvait se développer. Inaugurée en 2009, la station d’épuration du Porchon, liée à une refonte de l’intégralité des réseaux d’eau de la ville de Saint-Étienne, a redonné vie au Furan dans laquelle bon nombre d’espèces se sont réinstallées. Le milieu étant compatible à la vie piscicole, mais malgré tout dégradé par les siècles passés, il a été défini comme un parcours idéal à mettre en gestion halieutique entre les communes de Saint-Just-Saint-Rambert et d’Andrézieux Bouthéon. Géré de main de maître, il est empoissonné très régulièrement en truites arc-en-ciel, ce qui permet de les pêcher toute la saison hivernale (ce qui ne serait légalement pas possible avec des truites farios, même issues de pisciculture).
- Aappma : Gardon Forézien
- Longueur : plus de 2 kilomètres
- Limite amont : Passerelle reliant le chemin de l’ancienne gare et la RD 102 (centrale à béton)
- Limite aval : Pont de la RD 12
Le Sornin
Le parcours du Sornin, sur la commune de Charlieu est très facilement accessible. Il est constitué de zones avec de gros enrochements, de grands plats, et de courants. Les pêches à vue et en sèche sont praticables, et les pêches au streamer au fil sont extrêmement efficaces.
- Aappma : Les amis du Sornin
- Longueur : 1,5 km
- Limite amont : seuil du camping de Charlieu
- Limite aval : Pont de la RD 4 (route de Chaufailles)
Le Rhins
Ce parcours a vu le jour à l’automne 2022. Il fait l’unanimité auprès des pêcheurs Roannais, car très bien peuplé en truites de très belles tailles, les poissons de plus de 50 cm n’étant pas rare. Une succession de plats, de courants et de berges creuses offre une pêche extrêmement diversifiée.
- Aappma : Roanne et Région
- Longueur : 1,5 km
- Limite amont : Pont du Renouveau
- Limite aval : Jardins ouvriers
Le Lignon
C’est aujourd’hui le plus court des parcours no-kill de la Loire. Il n’en est pour autant pas le moins intéressant. Nous y trouvons une très belle densité de truites arc-en-ciel de taille moyenne (30/35 cm), reparties sur une alternance de radiers et de grands plats. C’est le plus « sauvage » des quatre parcours, et on peut capturer régulièrement d’autres espèces et notamment des ombres communs.
- Aappma : Les Pêcheurs de Lignon
- Longueur : 600 m
- Limite amont : confluence du Vizézy
- Limite aval : Pont métallique de Poncins
Comment bien pêcher ces parcours halieutiques
Avec toutes ces possibilités dans un périmètre relativement réduit, les pêcheurs locaux ont vraiment de quoi s’amuser régulièrement, mais les pêcheurs venant d’un peu plus loin pourront facilement venir découvrir ces différents parcours sur quelques jours pendant la période de fermeture. Toutes les techniques traditionnelles de pêche en rivière y sont efficaces. La pêche en nymphe au fil sera reine ! Mais attention à ne pas utiliser que les mouches dédiées aux truites fario. Le fait de traquer des truites arc-en-ciel ouvre le champ des possibles en termes de montage et l’utilisation de mouches hybrides entre celles utilisées en rivière et les modèles spécifiques à la pêche en réservoir feront des malheurs ! La pêche au streamer donne d’excellents résultats sur des poissons actifs ! Deux approches peuvent être complémentaires : la pêche au fil, afin de faire une pêche lente et précise, pour déclencher des poissons statiques. La pêche avec une soie intermédiaire, ou mieux, pointe intermédiaire, permettra de faire réagir les poissons les plus actifs du parcours. Son gros avantage sera aussi de couvrir rapidement beaucoup de terrain afin de découvrir les meilleures tenues des poissons. La sèche sera certainement la technique la moins régulière du fait de la raréfaction des éclosions à cette période de l’année, mais il n’est pas à exclure que sur des phases d’activités assez courtes, les poissons les plus ensauvagés aient les yeux tournés vers la surface. Nous retrouverons certaines mouches spécifiquement dédiées à ce type de parcours dans un prochain article.
Témoignage de Vincent Garnier, directeur de la fédération de pêche de la Loire
« La période Covid nous a amenés à faire évoluer la réglementation en matière de pêche de la truite sur notre territoire. En effet, la saison 2019 de pêche en première catégorie piscicole a été fortement impactée par les confinements. Nous avons donc travaillé à l’ouverture de la pêche de la truite en seconde catégorie, uniquement sur de l’arc-en-ciel, sur des parcours no-kill et sur des parcours où le prélèvement reste autorisé, afin que les pêcheurs puissent poursuivre leur saison après la fermeture et ainsi compenser le manque de pêche du début de saison ».
D'autres parcours halieutiques
Il existe depuis bien longtemps quelques parcours no kill en seconde catégorie, stockés en truites arc-en-ciel pour poursuivre la saison mouche en dehors des périodes d’ouvertures de la première catégorie. (Eyrieux en Ardèche, Gardon dans le Gard…). Mais ces parcours ne restaient que très confidentiels et gardés quasi secrètement par les pêcheurs locaux. Le travail de la fédération de la Loire essaye au contraire de généraliser la pratique en multipliant ces parcours sur son territoire et en les ouvrant au plus grand nombre, car accessible uniquement avec la carte interfédérale.