Ces dernières années, l’avènement de la compétition n’a fait qu’embellir l’image de ces pêches tout en repoussant toujours plus loin leurs limites techniques. Elles sont devenues aujourd’hui accessibles à la plupart des moucheurs et non-moucheurs grâce notamment à une gestuelle simplifiée peu gourmande en heures d’apprentissage. En prenant bien sûr en compte les différents niveaux de chacun, les gestes de base sont généralement maîtrisés rapidement et permettent une prise de poissons plus ou moins rapide au bord de l’eau. Encore faut-il savoir « lire » correctement un cours d’eau, adopter une prospection fine et méthodique de chaque courant, adapter ses montages et j’en passe… Mais là est un autre sujet. De mon point de vue, si aujourd’hui nous assistons à une certaine démystification de la pêche à la mouche c’est en partie grâce à ces approches modernes.
Des pêches de rendement
Pouvant être moins esthétiques que d’autres, les pêches au fil restent et resteront encore efficaces sur bon nombre de cours d’eau. Même si les résultats sont très subjectifs, elles se définissent comme des pêches de rendement destinées à des poissons de toutes tailles. N’ayant pas l’obligation de fouetter, ces techniques autorisent l’emploi de nymphes de tout poids et toutes tailles afin d’accéder aux couches d’eau inférieures. Ces dernières pouvant abriter de beaux poissons peu enclins à se déplacer pour prendre d’autres mouches dans la couche d’eau.
La polyvalence
Les premières cannes du marché offraient des actions plutôt rapides ou semi-rapides destinées à des pêches plutôt lourdes sur de fortes rivières de montagnes. De nos jours, l’évolution du matériel a ouvert d’autres portes et permet désormais de pratiquer ces techniques sur des cours d’eau plus calmes d’altitude moyenne. Les nouvelles cannes du marché sont aujourd’hui capables, grâce à leurs actions plus progressives, de projeter des nymphes tungstène relativement « légères » comme de petits streamers. Couplées à des moulinets aux freins micrométriques, elles autorisent des pêches fines sur des diamètres inférieurs aux 10/100 sans décrocher les poissons ni même casser.
Des mouches de conception simple
L’utilisation de nymphes est évidemment incontournable. Leurs aspects n’étant pas un critère décisif pour réussir, même les montages les plus simples sont susceptibles de leurrer des poissons. Dans un premier temps, les classiques pheasant tails et autres oreilles de lièvre sont toujours de bonnes bases à adapter selon les conditions du moment et les mœurs des poissons. L’essentiel étant de respecter les proportions et de ne pas être trop excentrique dans les coloris (l’observation des insectes présents dans la rivière est la meilleure règle à suivre pour « coller » à la réalité en action de pêche). Dans un second temps, une pratique régulière fera acquérir des connaissances sur les types et poids de mouches à utiliser en fonction des parcours choisis.
Limites dns le matériel et les profils de parcours
Les pêches en nymphe modernes requièrent un matériel bien spécifique et peuvent créer des dépenses supplémentaires dans le budget du moucheur. En effet des cannes pour soie de 2/3 ou 3/4 et d’une longueur supérieure à 10 pieds sont nécessaires pour contrôler parfaitement une dérive d’un point A à un point B. Pour les moyennes et grandes rivières on optera pour des cannes de 10,6 à 11 pieds. Côté moulinet, le semi-automatique est idéal pour ces pêches rapides. L’ajout d’une soie n’est pas nécessaire et un bon Nylon de 16 ou 18 centièmes fera un parfait corps de ligne. De plus, il glissera parfaitement dans les anneaux. En revanche, les soies parallèles (type JMC Visiolight) d’un diamètre de 55/100 (0,55) offrent une meilleure tenue des poissons lors des combats mais ne permettent pas la transmission d’énergie nécessaire pour les pêches à distance. Pour rester productif, le pêcheur au fil se doit d’effectuer une prospection courte (à petite distance dans l’axe du scion) or, certains profils exigent une pêche discrète à distance en nymphe ou en sèche et laissent apparaître certaines limites supplémentaires…
Les secteurs lents
Sachons-le, les pêches au fil dévoilent 100% de leur potentiel sur des parcours d’eaux rapides parsemés de postes et de courants bien marqués. Les grands « lisses » des rivières de plaines voire les grands courants réguliers et peu profonds de certaines rivières alpines font alors partie des facteurs limitants. Ici nos modèles spécifiques doivent être remplacés par des cannes plus classiques de 8,6 pieds à 10 pieds maximum pour soies de 4/5 voire 6 et d’action plutôt rapide. Ces dernières seront alors efficaces de la détection du poisson jusqu’à sa mise à l’épuisette. Un bas de ligne dégressif sera également de mise et remplacera le classique nylon monobrins cité précédemment. L’obligation de nouer une nymphe en tungstène à sa pointe pour lancer devient aussi une entrave. En effet, cela oblige les amateurs de pêches en sèche à pêcher avec un montage dit « sèche/nymphe » comportant la sèche en potence. Enfin, seules les artificielles ornées de billes en tungstène sont appropriées pour les pointes. Comme avec une sèche, l’usage de nymphes peu ou pas plombées n’est éventuellement possible qu’en potence. Dans certains cas où la discrétion est de mise, le « plouf » caractéristique de la tombée des nymphes casquées sur l’eau peut alerter nos salmonidés et compromettre ainsi le résultat final. Faut-il se contenter de ne pêcher qu’à une canne au risque de passer à côté de belles occasions ? Ou faut-il prévoir une seconde canne en cas d’activité de surface ? La question mérite d’être posée. Personnellement c’est avec deux cannes prémontées que j’arpente les rivières alpines. L’une dans le wader, l’autre à la main je peux alors m’adapter rapidement aux changements d’humeur de nos partenaires de jeux et changer facilement de techniques quand cela est nécessaire.