L'adage dit : « Il vaut toujours mieux s’adresser à Dieu qu’à ses saints. » C’est donc à Milan, chez lui, que nous avons rencontré Paolo Pacchiarini, célèbre monteur italien et non moins fabuleux pêcheur à la mouche. Tout ce qui nage l’intéresse, a fortiori s’il s’agit de « spécimens », car Paolo Pacchiarini aime bien voir les choses en grand. Du brochet, qui demeure un de ses prédateurs préférés, au black-bass et à la perche, sans oublier le sandre et le barbeau auxquels s’ajoutent l’alose et le silure. La liste s’allonge encore avec les espèces exotiques et tropicales, en eau douce ou en mer, qu’il traque inlassablement aux quatre coins du globe. Mais c’est sur le Pô et sur l’un des affluents du grand fleuve, le Tessin, que l’on a le plus de chance de le croiser, à bord de sa fidèle coque en alu dessinée par ses soins et parfaitement adaptée à la pêche au streamer. Lorsque vient la saison du brochet, c’est encore sur les grands lacs lombards qu’on le retrouve en action, notamment à partir de la mi-novembre jusqu’à la première période de froid qui, d’après lui, reste la meilleure.
Il cogite même la nuit
Ce n’est pas tant sur le palmarès édifiant de ce chasseur de prédateurs que nous allons nous attarder, mais plutôt sur le créateur, doublé d’un monteur hors pair qu’incarne « Pacchia » pour les intimes. À la pêche, comme derrière son étau, c’est bien la recherche d’efficacité et de simplicité qui l’anime constamment. De son propre aveu, il cogite même la nuit. Qu’une idée lui vienne et il la note sous la forme d’un croquis légendé. N’est pas inventeur qui veut. C’est dans les années 1980 que Paolo Pacchiarini se penche sur la question de la nage de ses steamers et sur la façon de les rendre toujours plus attractifs, même en eaux troubles. La couleur, la lumière et le mouvement sont à la base d’une équation qu’il se pose en permanence. Il délaisse la voie des rattles et autres blades car, selon lui, les ajouts alourdissent trop les streamers. En 1984, germe en lui un concept qu’il ne va pas tarder à expérimenter. Pourquoi ne pas ajouter des appendices aux streamers afin d’augmenter leur capacité vibratoire et ondulatoire, même par basse vitesse ? Paolo se met sur sa table à dessin et crée les premiers prototypes de ce qui ne s’appelle pas encore le Wiggle Tail (littéralement une queue qui gesticule), autrement dit une virgule qu’il souhaite la plus légère, la plus souple et la plus résistante possible. Notre créateur étant plutôt du genre perfectionniste, des études en laboratoire vont être menées durant deux ans, faisant appel aux dernières innovations de l’industrie textile. L’investissement financier est lourd, mais le résultat est là : le Scale Skin est né, une matière plastifiée pressée à chaud sur une bande textile renforcée par un fil métallique. La composition exacte est bien entendu tenue au secret et la marque déposée. Ce matériau peut se décliner dans toutes les couleurs du spectre, recevoir toute forme d’impression et être découpé dans une grande variété de forme. À cette époque, Paolo Pacchiarini ne s’attend absolument pas au succès que va rencontrer son invention, déjà trop content d’avoir mis au point un appendice qui, très vite, renforce l’efficacité de ses steamers. Deux formes d’apparence simple – car leur profil repose sur un subtil équilibre de vibrations – une fine, l’autre plus large, permettent déjà de faire appel au principal registre d’animations : une récupération lente mais qui brasse de l’eau par eau froide, une autre plus nerveuse et rapide lorsque la température se réchauffe.
Des essais confirmés
Une équipe de testeurs est bientôt mise en place et remonte des informations des quatre coins du monde. Les ventes décollent et des monteurs internationaux de talent intègrent le Wiggle Tail dans leur protocole de montage. Mais c’est l’ami de Paolo Pacchiarini, le fameux Niklaus Bauer, pêcheur suédois de légende, qui va le promouvoir avec la force médiatique qu’on lui connaît. Le scénario est tout trouvé puisque c’est sur un tube fly monté avec un Wiggle Tail en extension que Niklaus Bauer va battre son propre record personnel devant les caméras de télévision. Les réseaux sociaux ne vont pas tarder à s’emballer et à saluer la réelle efficacité couplée à la facilité d’utilisation de cette queue souple qui, déjà, se décline en de nombreuses formes, tailles et couleurs. Un chiffre éloquen t? Durant ces quatre dernières années, le Wiggle Tail s’est vendu à 4 millions d’exemplaires ! C’est un véritable plébiscite que rencontre cette invention. Paolo Pacchiarini, qui n’est pas du genre à rester les bras croisés, profite de ce véritable succès commercial pour mener de nouvelles études et de nombreux tests.
La famille s’agrandit
Le Wiggle Tail est décliné en de nombreuses tailles (du XS au XXL) et formes (pas moins de 45 références et 25 coloris), à l’instar du modèle Dragon Tail, le dernier né de la gamme, avec son design « en queue dentelée » et son graphisme poussé jouant sur les contrastes de couleurs. Paolo Pacchiarini a gagné son pari et se prépare déjà à de nouveaux lancements. Les dernières nouveautés en date : le Dragon Tail en taille XXL, le Saddle Tail (une queue simple) et le Double Tail. La famille s’agrandit, toujours avec cette qualité de nage exceptionnelle qui ajoute un supplément d’effets, donc de vie, sans précédent. Même à basse vitesse, sur un simple relâcher, la queue travaille, ondule en émettant des vibrations détectées par la ligne latérale et par les nombreux capteurs sensoriels du carnassier. On sait combien, dans certaines conditions, le brochet est sensible à ces effets « au point mort ». L’aspect visuel est tout aussi capital et renforcé par les flashs lumineux émis grâce au traitement pailleté qui est proposé sur de nombreux modèles. Par eaux troubles, les coloris fluorescents présentent un avantage évident, quant à la large gamme des teintes sombres pailletées, elle devra être explorée par basses lumières. Grâce à un système d’attache rapide mis au point par notre monteur italien, il est très facile de changer de queue en action de pêche et de jouer ainsi sur la taille, le coloris mais aussi sur la silhouette de l’imitation. Autant de paramètres qui, comme nous le savons, font bien souvent la différence selon l’humeur de nos chers carnassiers, et du brochet en particulier. Cette invention du Wiggle Tail et de ses dérivés marque certainement une des (r)évolutions les plus importantes dans l’univers des streamers destinés aux carnassiers. Il fait aujourd’hui école, et son succès est mondial. Parions que notre ami Paolo Pacchiarini ne s’arrêtera pas là.
Bonus : un streamer étape par étape
Sous les mains expertes du grand monteur italien, découvrez la réalisation d’un steamer à brochet qui peut d’ailleurs s’adresser à tous nos carnassiers d’eau douce, de la perche au silure, en adaptant simplement ses proportions et son armement. Respectez bien le protocole et chaque étape. Faites ensuite appel à votre imagination pour décliner des modèles qui vous ressemblent !