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Le tarpon, poisson de sport par excellence

Crédit photo Herlé Hamon
Nous allons cette fois aborder la pêche d’un des poissons les plus spectaculaires à prendre à la mouche, un jumper hors pair capable de cabrioles aériennes folles et de rushs très violents : le tarpon. C’est le troisième représentant du triumvirat de la mouche en mer tropicale, avec ses consorts bonefish et permit dont nous avons déjà parlés. Le sabalo, nom espagnol qu’il porte dans une grande partie des Caraïbes, déchaîne presque autant de passion que la palometa ! Les raisons de l’intérêt pour le tarpon sont en revanche très différentes de celles attirant le pêcheur de permit. Ici, ce n’est pas la difficulté à le faire mordre qui le rend si désirable, mais plutôt son tempérament de feu et sa gueule d’acier !

Le tarpon, c’est une torpille en écailles et montée sur ressorts. Il est agressif à souhait et survitaminé ! En effet, la première fois que l’on pique une de ces satanées bestioles et qu’on la décroche, trois secondes plus tard dans une énorme gerbe d’eau, on se pose vraiment la question du dopage chez les poissons ! Un sabalo qui croise le fer d’un streamer commence systématiquement par exécuter un énorme saut puis par recracher la mouche en secouant la tête violemment de gauche à droite pour nous signifier son mécontentement…

Fin de combat avec un beau tarpon cubain, pris sur la barrière de corail, dans environ quatre mètres d’eau
Crédit photo : Herlé Hamon

Une gueule d'acier

Sa bouche composée de plaques osseuses est si dure que les hameçons, même les plus affûtés, ont bien du mal à trouver un point d’ancrage. Aujourd’hui, les grandes marques comme Tiemco, Gamakatsu, Owner… proposent des références à « pointe rentrante » très affûtée et solide qui permettent d’améliorer le ratio poisson piqué/poisson pris. Le principe est qu’ils glissent dans la gueule et se fichent dans les commissures de la bouche ou parfois au bout du museau, d’où l’importance de la « pointe rentrante ». Pour cela, il y a une technique à respecter qui est simple en théorie mais pas toujours évidente en pratique. Lorsque l’on repère un ou plusieurs poissons, il faut d’abord anticiper leur déplacement et lancer largement devant, mais aussi bien au-delà de leur trajectoire. Il faut, en fait, éviter que lors des premiers strips, le tarpon se retrouve à suivre la mouche en revenant vers nous. Dans ce cas, il va sans doute accélérer pour avaler l’artificielle jusqu’à la glotte mais, même en tirant sur la soie comme un damné, on ne peut pas obtenir de contact franc, et le résultat est souvent une nageoire d’honneur dans une grosse éclaboussure ! Si, en revanche, le poisson s’éloigne de nous pour prendre, il tend déjà tout seul la soie et il ne reste plus qu’à garder la canne bien dans l’axe et à faire une grande traction de l’autre côté pour ferrer. Il s’agit surtout de garder la tension maximum pour que l’hameçon puisse rentrer. Il ne faut jamais lever la canne ou la mettre sur le côté, car cela amortit ce mouvement. Plus votre soie est droite, plus vous avez de chance de réussite. J’ai remarqué qu’au départ, rien ne sert de tirer plusieurs fois sur la soie, mais plutôt de la tenir fermement en tension maximale. Ensuite, souvent après le premier saut, vous pouvez ferrer à nouveau pour assurer la prise ! Voilà en ce qui concerne le ferrage, une des composantes les plus importantes de cette pêche. Vous verrez dans l’encart matériel que la soie a aussi une grande importance. Voyons maintenant les situations de pêche classiques auxquelles vous allez être confrontés. Dans la grande majorité des cas, on traque ce poisson en bateau, rares sont les flats à tarpon qui permettent le wading, même si cela arrive.

Le tarpon n’est pas une espèce très méfiante mais, une fois le bateau vu, il sera plus difficile de le faire mordre, même s’il suit la mouche jusqu’au bout de la canne !
Crédit photo : Herlé Hamon

Traque dans la mangrove

Le plus souvent, c’est à proximité de la mangrove que vous allez rechercher le « baby tarpon » c’est-à-dire les spécimens de 5 à 50 lbs environ. L’espèce aime tout particulièrement les labyrinthes de palétuviers et autres lagunes intérieures. Les sabalos sont alors souvent en « school », c’est-à-dire en banc de trois à une quinzaine d’individus. Les voir longer tranquillement les racines à la recherche de leur pitance est une superbe vision. Il faut réagir rapidement; votre guide doit tourner le flatboat dans une bonne position de tir. La mouche doit se poser bien trois mètres devant les premiers poissons pour ne pas les effrayer et se préparer à l’animer. Il est bon de la laisser couler quelques secondes, avant le premier strip. Le mouvement déclenche souvent l’accélération d’un ou plusieurs poissons du groupe, et le plus prompt avale goulûment votre streamer ! La suite est que ces baby tarpon ont l’habitude de grimper aux arbres, surprenant pour un poisson ! Ils font des bonds incroyables et se retrouvent régulièrement dans la végétation environnante en retombant ! Il faut essayer de les écarter des palétuviers pour les orienter vers le large où ils peuvent effectuer, en toute sécurité, de nouveaux sauts et autres acrobaties. Suit en général un beau rush, accompagné de nouvelles cabrioles. Il faut, bien entendu, adapter la puissance de son matériel à la taille de ces sabalos. Une soie de 8, voire 9 est souvent suffisante pour s’amuser. Dans la mangrove, vous allez croiser, comme nous l’avons vu des baby tarpon. Cependant, il m’est arrivé plusieurs fois de voir des poissons de plus de 80 lbs dans un mètre d’eau ! Vu la configuration des lieux, il est alors bien rare de sortir vainqueur de la joute halieutique avec un tel spécimen. Lors du combat, au départ, il convient plutôt de tendre le bras dans la direction des bonds pour limiter la tension exercée sur la ligne par ces figures aériennes ! Sur la fin, il ne faut pas hésiter en revanche à plonger la pointe de la canne sous l’eau pour limiter les derniers sauts et risques de décrochage. Puis, lorsque le poisson tourne autour du bateau, l’idéal est de s’équiper d’un gant de protection, de le saisir fermement par la mâchoire inférieure avant de le décrocher ou de le hisser avec précautions à bord pour prendre une photo souvenir !

Le tarpon ne se rend pas facilement, il est même l’un des poissons les plus endurants au combat ! Ici, je finirai bien par prendre ce beau spécimen en wading mais je vais casser la canne sur un dernier coup de tête
Crédit photo : Herlé Hamon

La pêche des chenaux profonds

Ces poissons sont assez curieux et peuvent parfois surgir à trois mètres du bateau alors que vous êtes coincés au fond d’un cul-de-sac avec un toit végétal vous empêchant toutes tentatives de lancer. Certains guides vont même jusqu’à taper du pied sur la coque du bateau pour les attirer. Il m’est arrivé quelques fois d’effectuer ce que l’on appelle un lancer arbalète, plutôt destiné aux truites, et de ferrer des « baby » sous la canne. Ensuite, il faut juste prier pour qu’ils se décrochent car, en général, ils tombent directement dans le bateau, manquant de briser les cannes que nous avons laissé traîner, ou sur nos pieds, ce qui fait un drôle d’effet la première fois ! Dans un tout autre registre, et lorsque l’on recherche les grosses bêtes, les chenaux profonds qui séparent les îles sont des zones de passages stratégiques incontournables. Ici, il ne s’agit pas de pêche à vue. Le guide plante souvent sa perche dans trois mètres d’eau sur la bordure d’un canal aux eaux bleues, voire noires. Il est souvent impossible de savoir sa profondeur au milieu, parfois entre 3 et 8 mètres. Pour cette pêche, le plus adapté est d’utiliser une canne numéro 12 équipée d’une soie plongeante de 450 grains par exemple. Il y a souvent du courant dans ces chenaux. Au flux comme au reflux, la marée forme de véritables cours d’eau concentrant la nourriture, et donc les prédateurs. Il convient de se placer sur la plateforme avant et d’effectuer de longs lancers vers le milieu du canal. Le courant entraîne la ligne. Suivant la profondeur, on peut la laisser couler quelques secondes avant de la ramener par de longs strips assez secs pour faire vivre la mouche. Ce n’est pas la technique la plus ludique et, après quelques dizaines de lancers, on commence souvent à fatiguer ! La touche est, en revanche, sensationnelle et nous fait vite oublier l’effort. La plupart du temps, on prend une énorme tape qui manque de nous arracher la canne des mains. Lorsque je pêche de cette façon, il m’arrive de faire du Rolly Polly. Le ferrage est alors vraiment en direct et très efficace, mais gare au démarrage et à la soie qui vole dans tous les sens ! Les gros tarpons font souvent un saut au départ, la gueule béante, s’agitant en tous sens, puis enchaînent avec un énorme rush. Le moulinet tourne alors à vitesse grand V, pas question d’y mettre les doigts sous peine de perdre quelques phalanges ! Il m’est arrivé de voir disparaître plus de 150 mètres de backing sur ce premier départ. Un gros sabalo est un coureur de fond, et il faut tenter d’exercer le maximum de pression pour ne pas éterniser le combat. Lorsqu’il arrive à quelques encablures du bateau, il va falloir l’empêcher le mieux possible de monter en surface pour prendre une bonne bouffée d’oxygène et replonger de plus belle ! En effet, les tarpons font partie des rares poissons ayant des ersatz de poumons et peuvent donc « respirer » de l’air atmosphérique pour se requinquer ! C’est un énorme avantage qui permet à l’espèce de vivre dans des lagunes d’eau saumâtres avec un très faible taux d’oxygène dissout. Comme je l’ai dit plus avant, il ne faut donc pas hésiter à plonger la canne dans l’eau pour déstabiliser un peu plus le poisson et l’empêcher de rouler en surface. Cette tactique permet souvent de gagner de précieuses minutes de combat, ce qui facilite la remise à l’eau de ces supers combattants dans de bonnes conditions. Même si les grands spécimens sautent moins que les plus petits, il faut être très attentif en fin de joute pour ne pas ouvrir l’hameçon ou rompre la ligne sur un dernier coup de tête rageur, ce qui est plus que désagréable après une demi-heure de lutte acharnée !

Voici un trophée pris en soie de 15 à Trinidad, une destination totalement méconnue pour la pêche à la mouche et que j’ai eu le plaisir de découvrir parmi les premiers, pour mon plus grand bonheur…
Crédit photo : Herlé Hamon

Sur les extérieurs des îles et les tombants

Le dernier cas de figure que l’on rencontre régulièrement est la prospect de l’extérieur des îles ou des tombants, aux abords des falaises ou des récifs coralliens. Suivant la destination, les fonds peuvent varier de 2 ou 3 mètres à plusieurs dizaines. Dans les eaux cristallines et peu profondes, il est possible d’apercevoir les « schools » de tarpons de très loin, de grosses barres noires se détachent alors sur des fonds de sable. C’est l’image d’Épinal que l’on peut observer lors de la migration dans les Keys de Floride où sur certains secteurs de Cuba par exemple. Dans les grands fonds et lorsque les eaux sont moins claires comme à Trinidad ou au Costa Rica, il faut essayer de repérer les signes. Notamment les « éclairs » qui apparaissent sporadiquement ou les dos qui crèvent la surface en marsouinant. Les grandes écailles sur le dos de ce poisson d’argent agissent alors comme un caléidoscope reflétant en tous sens les rayons du soleil. Ensuite, il faut anticiper la trajectoire et mettre le turbo pour rattraper la petite troupe repérée. Cela met parfois les muscles des guides à rude épreuve lorsqu’il faut percher contre le vent pour bien se placer et arriver à distance de lancer. Suivant les conditions, j’aime utiliser ici une soie avec pointe intermédiaire transparente, car il n’y a pas forcément besoin de présenter la mouche en profondeur. Le tarpon est un poisson qui monte volontiers en surface, et on peut même le prendre au popper, même s’il se décroche alors encore plus régulièrement qu’au streamer ! Les tarpons de 40 à 80 lbs sont de parfaits adversaires pour la pêche au fouet, c’est la taille idéale lorsque l’on parle de combat, même si un « grandes écailles » de plus de 100 lbs vous laissera un souvenir inoubliable. Les trois exemples ci-dessus illustrent les principales techniques que vous allez rencontrer pour leurrer le roi d’argent. Le tarpon est l’un des poissons les plus agréables et sensationnels à prendre à la mouche et, ce qui ne gâche rien, c’est que plusieurs destinations vous permettent également de tenter votre chance sur ses deux compères bonefish et permit, et pourquoi pas, de réaliser le fameux « Grand Slam » !

Les destinations pour le tarpon à la mouche

Cuba
Sur les six ou sept coins de pêche proposés à Cuba, trois surtout sont bons pour la pêche du tarpon. Il s’agit des jardins de la Reine et de l’île de la Jeunesse à l’ouest, et de Cayo Santa Maria à l’est.

La Floride
Pendant les mois de mai et juin, la Floride vit au rythme de la migration des tarpons. Il y en a beaucoup, et de très gros, mais il y a aussi énormément de pêcheurs, et les bateaux sont parfois à touche-touche sur les meilleures zones.

Le Mexique
Au nord de la province du Yucatan au Mexique, se trouve une île appelée  Isla Holboch qui, de mai à juillet, voit s’arrêter pas mal de beaux tarpons de 100 lbs et plus. D’autres lagunes sont connues pour le tarpon, notamment dans la province de Campeche.

Belize
Il y a de bonnes possibilités de pêche au tarpon sur la côte de ce petit pays, surtout au nord. La bonne période va, là encore, de mai à juillet, surtout lors de la migration.

Venezuela
À Los Roques, la pêche du tarpon est secondaire. Il y en a toujours un peu, mais les gros passages sont plus rares.

Nicaragua
Le Rio San Juan possède de gros tarpons, mais la pêche à la mouche n’est vraiment pas la technique la plus efficace…

Costa Rica
Tout comme son voisin, l’embouchure du Rio Colorado est un haut lieu de la traque des gros sabalos. En revanche, leur capture à la mouche reste un challenge dans ces eaux marron…

Trinidad
Cette île, très peu connue, que j’ai pu prospecter avant la période de Covid-19, possède une excellente population de tarpons de 20 à plus de 150 lbs...

 

 

Les mouches classiques pour le tarpon sont surtout noires et rouges, chartreuses, violette ou orange. Les fameuses « toads », avec une queue en marabout et un corps taillé en forme de crabe en synthétique, restent des valeurs sûres
Crédit photo : Herlé Hamon

Le matériel pour le tarpon

Pour le baby de 5 à 20 lbs, il vous suffira d’utiliser votre matériel à bonefish en soie de 8, en rajoutant, au bout de votre bas de ligne en 30 lbs, un « shock tippet », c’est-à-dire une cinquantaine de centimètres de Nylon ou fluorocarbone plus gros que votre bas de ligne en 50 lbs, par exemple, pour éviter que le frottement sur les plaques osseuses de la gueule ne le coupe. Rajoutez à cela un streamer, monté sur un hameçon de qualité de 1 à 2/0.

Les mouches, dans les coloris suivants, sont à privilégier pour les petits mais aussi les gros : orange/jaune, noir/rouge, violet/chartreuse, beige et blanc/brillant ou de type Gummy Minnow lorsque les tarpons tapent dans des boules de poissons fourrage. Pour les sabalos de 20 à 80 lbs, une soie de 10 est parfaite. Comme d’habitude, le moulinet doit avoir un bon frein, être large arbor et avoir au moins 150 m de backing 30 à 50 lbs ou de tresse en 60/80 lbs par exemple. Les mouches doivent être montées sur d’excellents hameçons genre Tiemco 600 SP, TOF MS4 (excellent rapport qualité-prix), Owner Aki pointe rentrante et biseautée ou encore Gamakatsu SL 12S en 2/0 à 6/0. Le shock tippet sera alors en 80 lbs et le bas de ligne en 50 lbs. Une fois la longueur de la canne est un maximum.

Au-delà des 80 lbs, un ensemble en soie de 12 est le mieux adapté. Il vous permet de travailler en puissance ces gros poissons très endurants. Lorsque vous avez de réelles chances de toucher des tarpons de plus de 120 lbs, les cannes de 14, voire 15/16 sont alors intéressantes, mais il faut avoir le bras qui va avec, surtout si vous devez lancer toute la journée… Le shock tippet sera ici d’au moins 100/120 lbs et le corps de ligne en 80 lbs. Un petit mot sur les soies. Aujourd’hui, la plupart des grandes marques proposent des soies « tarpon » parfaitement adaptées à ce genre de poissons marins à grandes dents et gueule d’acier. Il faut des profils bien décentrés vers l’avant et une âme avec très peu d’élasticité et une grande résistance ! Cela permet un contact direct lors du ferrage et transmet beaucoup mieux l’énergie qu’une soie mer classique. De mon côté, j’utilise les Scientific Anglers Sonar Titan qui font 80 lbs, voire 100 lbs de résistance pour certains modèles.

 

 

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