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Escapade au phare du Four avec le guide de pêche Jérémy Sergent

Le phare du Four est classé parmi les plus terribles, ceux de l’enfer, par les gardiens. C’est tout dire ! Si bars, lieus jaunes et pagres fréquentent assidûment les alentours, pêcher dans le chenal du Four, et qui plus est à proximité du phare éponyme, ne s’improvise pas. Mieux vaut être bien guidé !

La mer est légèrement ridée ce matin à la cale de Lanildut, port Goémonier en mer d’Iroise. Le coefficient de marée est de 65, ascendant et, avant de larguer les amarres, Jérémy Sergent, alias Docteur Dj" Fishing, accompagné de son ami Joseph, rappelle les consignes de sécurité. « La mer est certes un extraordinaire espace d’aventures mais si on n’y prend pas garde, si on ne la respecte pas, si on ne m’écoute pas, on met sa vie en danger… » Après, ce petit rappel, le capitaine passe au menu du jour, un menu plutôt gastronomique puisqu’il a prévu de pêcher le lieu au leurre souple en grande profondeur, de taquiner les pagres au Kabura puis de faire du "rase-cailloux", histoire de rencontrer un bar… « Toutes les pêches sont nobles si elles sont réalisées avec respect et parcimonie », souligne le guide.

Le Centaure de 6,20 m de longueur est très bien motorisé et permet à Jérémy de naviguer en toute sécurité avec ses clients.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Où sont les lieus ?

Nous voguons en direction du phare du Four qui, par son emplacement, fascine. Il marque le partage des eaux entre la Manche et l’océan Atlantique. Jérémy nous positionne à l’ouest du phare. En face, c’est l’île d’Ouessant. « Flot ou jusant, peu importe ! L’essentiel est de privilégier les coefficients ascendants compris entre 60 et 70. Au-delà, le courant de marée est trop puissant. »

Isolé au large de la presqu’île de Saint-Laurent, le phare du Four sépare symboliquement la Manche et l’océan Atlantique. Haut de 28 m, sa portée lumineuse atteint 45 km. Bâti en granit, à 2 km de la côte, il est mis en service en 1874. Il fut automatisé en 1993. Il a pour mission de baliser le chenal du Four réputé pour sa dangerosité. Avant la mise en place du rail d’Ouessant, ce chenal était une voie de circulation très fréquentée par les navires. Plusieurs phares jalonnent ce passage, les phares du Four, des Pierres noires, de Trézien, de Kermorvan et de Saint-Mathieu. Ses abords sont couverts de roches émergentes. En outre, le passage n’est pas large, ce qui fait que la moindre erreur d’appréciation peut être fatale. On n’emprunte pas le chenal du Four à la légère.
Crédit photo : Thierry Sauvin

C’est sur des fonds de roche avec de petits bancs de sable dans une profondeur de 70 mètres que nous promenons nos leurres souples enfilés sur des têtes plombées effilées de 90 à 120 g. « Le grammage dépend en grande partie de la profondeur et de la vitesse de dérive. Plus elles sont importantes, suite au courant de marée, plus le poids doit être conséquent afin de gagner rapidement la bonne profondeur et de bien sentir son leurre. »

Dès la première dérive les lieus ont sauté sur nos leurres souples. Le guide de pêche connaît parfaitement la zone et place son bateau là où il le faut.
Crédit photo : Thierry Sauvin

L'ascenseur, technique imparable 

Jérémy utilise une canne spinning d’une puissance de 30/110 g pour animer ces gros leurres souples imitant pour la plupart des lançons. En taille 4000 ou 5000, le moulinet est garni d’une tresse en 16/100 suivi d’un long bas de ligne de 3 mètres en fluorocarbone en 35 ou 40/100. Le pêcheur rappelle que ce poisson, contrairement aux idées reçues, n’est pas collé au fond. « D’ailleurs la morphologie du lieu, et notamment sa gueule orientée vers le haut, souligne le fait qu’il se nourrit bien au-dessus du fond. » Côté animation, Jérémy fait évoluer lentement son leurre en dents de scie mais, pour lui, l’animation la plus appropriée est celle de l’ascenseur. Après avoir pris contact avec le fond, il remonte le leurre lentement sur une vingtaine de mètres puis le laisse redescendre tout en maintenant un certain contrôle car la touche a souvent lieu lors de la descente. « La vitesse de récupération est importante, il faut tâtonner, chercher le bon rythme et marquer des temps de pause lors de la remontée. Un leurre souple, même à l’arrêt, est toujours en mouvement. »

Le guide choisit souvent des leurres souples effilés aux couleurs naturelles pour traquer les lieus.
Crédit photo : Thierry Sauvin

La couleur ad hoc

Jérémy préfère les leurres de couleurs naturelles, celles que l’on rencontre en profondeur. « Le lieu aime les secteurs rocheux avec du goémon. Il est judicieux de lui proposer des leurres aux couleurs marron clair, vert olive… » Cela étant, par temps sombre, tôt le matin et tard le soir, il n’hésite pas à utiliser des leurres souples aux couleurs affriolantes, rose ou rouge. Quand le courant s’accentue, la pêche au jig métallique prend parfois l’avantage sur le leurre souple. « Un jig effilé permet de fendre rapidement la colonne d’eau. J’utilise alors une canne casting. On contrôle mieux la descente du leurre et on accroche moins car, dès l’impact sur le fond, on peut embrayer le moulinet. Le leurre n’a pas le temps de se coucher et donc les assist hook s’accrochent moins. » Sur des postes bien marqués, Jérémy promène son leurre souple dans les bas-fonds, là où vivent bien cachées les juliennes.  « C’est en faisant des animations lentes au ras du fond qu’il est possible de les déloger ! Bien qu’étant un poisson de roche, la julienne sort facilement de son trou lorsque le courant est marqué. Sur des zones rocheuses riches en "cavernes", on peut toucher ces poissons assez haut dans la couche d’eau, parfois jusqu’à 20 mètres du fond », précise ce passionné. Pour cette lingue franche, qui peut atteindre des tailles impressionnantes, il n’hésite pas à mettre un bas de ligne en 60/100 car il faut la brider fermement pour la sortir de son trou dont les parois rocheuses sont souvent fatales pour la ligne.

Censé imiter un petit poulpe, le kabura comporte une jupe synthétique colorée et peut recevoir une petite lanière de calamar pour augmenter son attractivité. Seules des coquettes, des labres, ont été séduites.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Changement de technique

Dès la première dérive, les lieus se sont montrés coopératifs. Après avoir mis au sec quelques spécimens dont certains dépassent les trois kilos, Jérémy nous propose de taquiner les pagres au Kabura. « Dans 70 mètres de profondeur les lieus, une fois mis au sec, ne repartent pas. Il faut donc savoir s’arrêter et passer à autre chose ! » Le Kabura est un leurre appât censé imiter un petit poulpe. Il est composé de deux empiles, d’une jupe constituée de brins de silicone ultra-souples, de deux paires de longs tentacules, le tout devant créer des vibrations avec un effet de volume. Les sparidés, et plus précisément les pagres, en sont friands. Afin d’accroître l’attractivité du Kabura, Jérémy enfile sur l’hameçon des empiles, une petite lanière de calamar. « C’est justement cette association leurre et appât qui fait que cette technique est très efficace. » Pour le pagre, il recherche principalement les secteurs dont le fond est composé de maërl, cette algue rouge calcaire abondante en rade de Brest et en mer d’Iroise. Ce jour-là, les pagres ont boudé nos kaburas. Seules les coquettes et quelques tacauds se sont montrés joueurs.

Les vieilles aux magnifiques robes sont à l’affut dans les secteurs de roche. Elles ne font qu’une bouchée des leurres souples bien présentés.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Des vieilles en lot de consolation

Jérémy prospecte parfois les abords du phare du Four quand l’état de la mer le permet. Au pied de l’édifice, le tombant est assez brutal. On passe de 0 à 40 m sur 20 mètres de distance ! Outre la présence, près du fond, de très belles vieilles, le bar aime patrouiller le long du tombant. Très concentré, Jérémy sait que le bar est tout contre la roche et que ces postes, où la mer blanchit, sont dangereux. « On n’est jamais à l’abri ! Quand la mer baisse, les rochers montent », dit-il ! Les deux amis utilisent un matériel plus léger, une canne spinning de puissance 5/20g avec un leurre souple, un Crazy Paddle Tail de 12 cm monté sur une tête plombée de 10 ou 15 g. Tous deux pêchent en traction. Cannes à l’oblique, ils font des tirées plus ou moins sèches avec des phases de descentes planantes. « L’essentiel est d’avoir un leurre qui ne plonge pas comme une enclume, qui ait une nage ressemblant à un poisson un peu estourbi par le courant et donc vulnérable. » Malgré ses tentatives tout contre les rochers, seules les vieilles se sont montrées coquines… Comme d’habitude, elles n’ont fait qu’une bouchée des leurres souples. Le site est superbe, l’ambiance magnifique ! Entre deux prises, Jérémy me glisse à l’oreille qu’il propose aux plus aguerris des sorties thon rouge sur chasse, histoire de se mesurer au poisson d’une vie ! Tiens donc…

Les secteurs de roche où la mer vient frapper la terre et blanchit la surface de l’eau sont les meilleurs pour le bar. Mais aussi les plus dangereux ! 
Crédit photo : Thierry Sauvin

Un équipement au top

Jérémy confectionne ses cannes, spinning et casting, à partir de blanks Rod House. Pour les pêches fortes, ses cannes spinning sont équipées de moulinets Stella 5000 SW (Shimano) et Certate LT 4000 (Daiwa). Pour la pêche en casting, Jérémy utilise un Lexa 300 WN HSL (Daiwa) et un Ocea Calcutta 301 HG (Shimano). Pour les pêches plus légères, il possède des moulinets Stella 2500 SW (Shimano) et Caldia LT 2500 (Daiwa). Tous sont garnis d’une tresse en 8 brins YGK ou Westin X 10 allant du 10 au 16/100.

SES LEURRES DE PRÉDILECTION
Pour le lieu

  • Crazy Sand Eel (Fiiish) en 22,2 cm avec tête plombée en 60 et 130 g
  • Black Eel (Fiiish) en 15 cm avec tête de 40 g
  • Crazy Paddle Tail (Fiiish) en 22 cm (réalisation personnelle) avec tête de 90 à 130 g
  • Black Minnow (Fiiish) en 20 cm avec tête de 150 g
  • Madness Madeel en 14 cm (Ultimate Fishing)

Pour le bar

  • Black Minnow (Fiiish) en 9 et 12 cm
  • Crazy Paddle Tail (Fiiish) en 12 et 15 cm

Lorsqu’il tente sa chance auprès des sparidés, Jérémy fabrique ses propres kaburas ou bien utilise les Hinata Kab et Shugo Kab Explorer Tackle (Flashmer). Détenteur du permis hauturier, il navigue sur un semi-rigide Centaure 6,20 m XL équipé d’un moteur Mercury 200 CV. Ses choix en matière de zones de pêche
dépendent de la saison et des conditions météorologiques : rade de Brest, l’Aber Wrac’h et les environs de l’île Vierge, le phare du Four, Molène et Ouessant Jérémy organise aussi des sorties du bord et notamment en estuaire.

CONTACT

Docteur Djé Fishing
Jérémy Sergent
https://www.guidedepechefinistere.bzh
contact@guidedepechefinistere.bzh
Tél. 06 45 67 78 71

Un bel assortiment de Black Minnow, Crazy Sand Eel, Crazy Paddle Tail et Black Eel de Fiiish.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Renseignements pratiques

ADRESSE UTILE
Office de tourisme Iroise Bretagne - Tél. 02 98 38 38 38

DÉTAILLANTS
Alré pêche - 1 rue du Commandant Mindren - 29200 Brest - Tél. 02 98 41 67 43
Au fil de l’eau - 20 bis rue Saint-Esprit - 29260 Lesneven - Tél. 02 98 46 63 66
I-Mer - Route de Brest - Le Goasmeur - 29217 Plougonvelin - Tél. 02 98 38 00 68

HÉBERGEMENTS
GÎTES
Le nid d’Iroise - 4 Hent Kergaradoc - 29840 Lanildut - Tél. 06 52 77 71 12 - lenidiroise@gmail.com
Christine Tavela-Drezen - 61 route des Liniou - Tél. 07 86 50 27 87 - christine.tavella@orange.fr

CAMPING
Camping du Tromeur** (mobil-homes) - 11 route du camping - 29840 Lanildut - Tél. 07 89 00 00 24 - www.tromeur.fr

À VOIR, À FAIRE

  • Découverte de l’Aber Ildut à pied ou en kayak (location sur place à la boutique du Crapaud)
  • Les trois abers : Ildut, Benoît et Vrac’h
  • Liaisons maritimes vers Ouessant et Molène au départ de Lanildut ou du Conquet
  • La pointe Saint-Mathieu et visite du phare
  • Pêche de la truite dans les trois abers

 

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Magazine n°936 - Mai 2023

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