Autrefois largement redoutée pour ses crues, la capricieuse Durance comme la surnommaient les anciens, a été soumise à de nombreux aménagements à des fins hydrauliques. D’ailleurs, sur ce secteur de pêche, à l’aval du barrage de Curbans, la Durance voit son débit diminuer à cause de la prise d’eau du canal de l’usine électrique. Première prise de contact sur les conseils des frères Galliano qui nous guident judicieusement sur un secteur magnifique. Les courants sont réguliers et parsemés de gros rochers qui provoquent des turbulences où se tiennent les salmonidés. Au milieu des vergers de pommiers et des champs de tournesols, la Durance semble ici serpenter avec nonchaance. Nous observerons d’ailleurs dès notre arrivée plusieurs grosses farios en poste dans la grande retourne sous le barrage. Des poissons de belle taille, visiblement attablés sur des gammares.
Au fil...
Si le secteur est réputé pour ses gobages selon nos guides, nous allons tout d’abord prospecter en nymphe au fil en attendant l’apparition des insectes. Bastien touche de suite une jolie fario qui se débat dans le courant mais lui fausse compagnie. À peine relancé et il en prend une autre. Dans un large courant, Arnaud qui pêche en sèche nymphe voit disparaître son petit parachute et sur un ferrage réflexe, il pique un poisson qui enchaîne cabrioles et voltiges, pas de doute, c’est une truite arc-en-ciel de 35 cm qui rejoint l’épuisette. Le poisson est en pleine forme et relâché rapidement. En effet à l’initiative de « La Gaule Durançole » de nombreuses truites arc-en-ciel ont été introduites sur ce secteur de seconde catégorie et permettent aux pêcheurs à la mouche de pratiquer pendant l’arrière-saison avec de belles surprises à la clé !
Je remonte de quelques centaines de mètres avec l’ami Bernard, et nous commençons à prospecter une zone plus étroite avec des courants assez profonds qui « lèchent » les racines de la ripisylve. J’ai monté deux petites nymphes dont la plus lourde est dotée d’une bille cuivre et d’un corps noir. Après quelques dérives infructueuses, j’attaque un courant profond et surveille du coin de l’œil mon fil fluorescent. Alors que je relève lentement ma canne, une touche lourde se produit et ma 10’6 Performer prend une jolie courbure. C’est une belle fario bien zébrée qui va rejoindre doucement l’épuisette. Magnifique poisson à la robe typique de la Durance. Nous n’insisterons pas davantage car les poissons ne semblent pas de sortie sur ce secteur.
Oreille de lièvre
En cette fin de matinée, Bernard me recommande un secteur de courant moyen, profond d’un mètre par endroits, avec quelques grosses roches, où les truites se postent souvent pour venir en surface. Après dix minutes d’observation, quelques insectes se mettent à voler au-dessus de l’eau et un premier remous apparaît. Comme les truites ont l’air plutôt capricieuses en cette journée, je prends tout mon temps pour entrer dans l’eau et me poster au mieux. Vairons et autres petits poissons blancs décampent sous mes premiers pas. Pas de doute, ici les truites ont de quoi se maintenir en bonne santé.
La truite se manifeste à nouveau. Je change de canne pour une 9 pieds soie de 5 et je monte une petite oreille de lièvre en hameçon de 16, sur une pointe en 11 centièmes. Je vérifie aussi que mon frein est parfaitement réglé. Premier lancer trois mètres à gauche du gobage juste pour prendre la bonne distance, tout a l’air parfait. J’attends que ma ligne descende pour ne pas provoquer un arraché bruyant et pose ma mouche deux mètres au-dessus du gobage. Remous sur la mouche ferrage et c’est encore une belle fario sauvage qui va avoir les honneurs du photographe. Ces truites sont bien rondes et en parfaite santé. Plus en aval, un autre poisson gobe régulièrement, je sèche rapidement ma mouche avec de l’amadou et ajuste un lancer un peu plus détendu. Lorsque mon émergente arrive à la bonne hauteur, un museau sort de l’eau ! Ferrage en souplesse, mais le poisson est lourd et il file déjà vers les racines. Je couche la canne à plusieurs reprises et parviens avec l’aide de Bernard, à glisser cette arc-en-ciel de 45 cm dans l’épuisette. Un beau poisson, bien proportionné et en pleine forme.
Le long d'un tronc
Avec tout ce « raffut », l’activité s’est ralentie, nous ressortons de l’eau et je dépose mes cannes sur un gros rocher toujours en scrutant la surface. Après quelques minutes d’échange sur nos mouches respectives, deux poissons se mettent à nouveau à gober. En face de moi, une belle truite prend des insectes régulièrement le long d’un tronc d’arbre, mais une ficelle qui descend au-dessus de l’eau risque de me compliquer la tâche ! Bernard attaque un poisson en face de lui sous les branchages ! Au deuxième passage la truite monte, sa canne se courbe, mais la ligne se détend. Dommage ! Quant à moi, après sept ou huit tentatives manquées, je parviens quand même à faire passer ma mouche contre l’arbre immergé sous la fameuse ficelle ! Gobage furieux et démarrage en trombe dans les branches, puis vers l’aval. J’avais eu la bonne idée de régler mon frein juste avant. Le poisson sort presque toute la soie et la canne est totalement cintrée. Quel rush ! Une superbe arc-en-ciel de plus de 50 cm arrive enfin dans l’épuisette, après un énorme combat. Ma petite mouche est bien plantée à la commissure de ses lèvres. Un beau coup de ligne, pour ce poisson qui sera rapidement remis dans son élément !
Une belle initative
Certains pêcheurs quelque peu « élitistes » penseront que pratiquer un parcours où des truites arc-en-ciel sont régulièrement introduites, n’est pas d’un grand intérêt piscicole. Personnellement, je pense exactement le contraire. Il faut rappeler que, sur ce secteur de seconde catégorie, nous sommes exactement sur ce que nous avons coutume d’appeler la « zone à barbeaux », où de fait la pêche à la mouche n’est pas forcément de mise. Malgré cela, une belle population de truites sauvages autochtones se maintient avec de très gros spécimens. L’augmentation du débit réservé obtenu début 2010 a favorisé la bonne représentation des salmonidés en constituant même un secteur où de grosses truites sont bien présentes et recherchées. La création de tels parcours, où l’on peut pratiquer en arrière-saison, est toute à l’honneur de la société de pêche locale. Donc si vous passez dans le secteur, ne manquez pas ce coin de pêche passionnant !
Contacts utiles
• La basse Durance :
AAPPMA « La Gaule Durançole », Jacques Fabre. Email : jacques.fabre5@gmail.com
• Fédération des Hautes-Alpes : Bernard Fanti - 16 avenue Jean Jaurès - 05000 Gap - 0492535471,
• Office du tourisme des Hautes-Alpes - https://www.hautes-alpes.net/fr
• Les frères Galliano : https://www.guides-peche.com
Des villages pittoresques
• CURBANS est situé en moyenne montagne, entre Haute-Provence et Hautes-Alpes. Ici la Durance a une présence marquante et son lit, dont la largeur varie entre 200 et 500 m, forme une coupure nette dans le paysage. Les collines et les montagnes d'altitude moyenne et les nombreux ravins de la commune forment autant d'autres coupures, et le territoire de Curbans est aussi partagé entre la vallée de la Durance et la vallée du Grand Vallon.
• VENTAVON est un joli village fortifié autour de son église Saint-Laurent (XIlème siècle) et de son magnifique château du XV° siècle. Dominant la vallée de la Durance, Ventavon est traversé par la Route Napoléon. Un très beau portail style Renaissance donne accès à la cour de la place du village. Au centre du bourg, on aperçoit son église avec son campanaire et le beffroi accolé, surmonté d'une horloge à quatre cadrans et avec une table d'orientation.