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Les acides aminés, des stimulateurs d'appétit en hiver pour le silure

Aves trois paires de barbillons et deux paires de narines, le silure est équipé pour identifier les saveurs les plus subtiles.

Crédit photo Lilian Fautrelle
L’hiver, l’activité générale des silures chute drastiquement. Pour les convaincre de s’alimenter malgré tout, il va falloir insister et chercher comment déclencher les bons stimuli. Certains acides aminés peuvent être la solution.

Le silure est équipé d’un système sensoriel très développé. Ses capacités pour déceler les sons et localiser toute source de vibrations, ne sont plus à démontrer. Les pêcheurs de silures les mettent à profit dans les pêches au clonk ou aux leurres. Mais ce poisson dispose également de sens de l’odorat et du goût hors du commun en eau douce. La sensibilité hyper développée de ses capteurs de goûts et d’odeurs est encore assez peu exploitée alors qu’elle peut s’avérer très rentable, notamment en hiver.

Les jours d’hiver sont courts. L’appât doit diffuser rapidement les bons acides aminés, même en eau froide.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Les capteurs

Le silure est pourvu de deux paires de narines et de trois paires de barbillons, toutes et tous permettant de percevoir les effluves dissous dans l’eau. Contrairement à l’homme, capable d’inspirer ou d’expirer, le silure analyse un flux d’eau continu et à sens unique, entrant par les narines antérieures et sortant par les narines postérieures, pour identifier toute molécule dissoute potentiellement indicatrice d’une source de nourriture. Mobile et longue, la paire de barbillons située sur la mandibule supérieure est bien connue des siluristes pour ses rôles tactiles et d’antennes radars à vibrations.

Deux appâts strictement identiques immergés pendant 12 h dans une eau à 6 °C (à gauche) et dans une eau à 21 °C (à droite).
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Analyse fine

Néanmoins, ils sont aussi bardés de chimiorécepteurs gustatifs. Pour bien comprendre cette fabuleuse aptitude, imaginez si vous pouviez ressentir le goût d’un aliment en le touchant du doigt ! En complément, le silure possède deux autres paires de barbillons, plus petits, situés sous la mandibule inférieure. Ces organes sensoriels lui permettent d’affiner les informations gustatives ébauchées à distance, et d’analyser avec précision les effluves repérés à plus courte distance, venant d’un tapis de bouillettes ou de pellets disposés sur le fond, par exemple. En définitive, cet équipement sensoriel, exceptionnel dans nos eaux douces, permet aux silures de détecter de nombreuses substances dissoutes, sur de grandes distances, peu importe la luminosité ou la turbidité de l’eau, et avec une acuité cent mille fois supérieure à la nôtre !

Les croquettes

Les sacro-saintes croquettes pour chien, des esches et amorces bon marché, sont des références. Gros avantage : on connaît un peu plus précisément la composition de ces appâts, normalement indiquée sur l’emballage. On y trouve en général des protéines de bœuf (riches en glutamine, leucine et valine) et de poisson (riches en alanine) mais aussi des acides aminés qui pourraient être l’un des secrets de leur succès auprès des silures.

Les deux paires de narines du silure lui permettent d’analyser un flux d’eau continu.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Les sauveurs

Parmi les molécules que le silure va détecter figure la grande famille des acides aminés. Bien connus des nutritionnistes et des culturistes, ils jouent un grand rôle dans le métabolisme, la structure et la physiologie des cellules de tout être vivant. Liées les unes aux autres, ces chaînes d’acides aminés prennent alors les appellations de peptides et de protéines. Les pêcheurs de carpe ont une longueur d’avance quant à leur utilisation dans la composition des appâts. Mais d’un strict point de vue biologique, les acides aminés déterminants diffèrent significativement d’une espèce à l’autre. La taurine, par exemple, bien connue des sportifs (et des fêtards…) est un acide aminé impliqué dans plusieurs voies métaboliques chez l’homme, systèmes cardiaque ou nerveux central notamment. Des rôles importants que l’on retrouve chez d’autres mammifères, comme le chat par exemple, mais pas chez le chien. Les besoins spécifiques de chaque espèce entrent donc en ligne de compte.

Mieux vaut rester cohérent dans ses mélanges : ici, appât et pâte d’enrobage sont à base de farine de flétan.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Les bons acides

Chez la carpe, des études menées par l’Inra ont démontré que certains acides aminés (arginine, lysine, glutamine) pouvaient augmenter significativement l’activité des carpes. D’autres (alanine, leucine, valine) sont capables, eux, d’augmenter l’appétence d’une nourriture proposée. En revanche, certaines combinaisons d’acides aminés engendrent des phénomènes de répulsion franchement marqués. Pire encore, dans certains cas, l’association de certains acides aminés, pourtant favorables utilisés de manière indépendante, devenait néfaste pour l’attractivité d’un appât !

En hiver, l’appât doit diffuser et être efficace le plus rapidement possible. A gauche, Llappât témoin, après 15 min de trempage dans une eau à 6°C. Au milieu, le même appât, mis à tremper 24 h avant dans un bain d’huile. Et enfin à droite, le voici enrobé d’une pâte élaborée pour les eaux froides.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Un peu de biologie

Pour aller plus loin, j’ai donc vérifié la composition générale des farines utilisées comme matières premières chez les fabricants d’appâts. J’ai surtout cherché celles qui, sur le papier, semblent stimuler l’appétit des silures. Sachant que les carpistes croisent régulièrement des silures sur leurs amorçages, et prenant en compte leur expérience dans la composition des bouillettes, on peut émettre l’hypothèse que carpes et silures ont bien des points communs en la matière. Les résultats d’analyses chromatographiques des laboratoires de biologie alimentaire montrent que les farines de flétan ou de poulpe contiennent deux fois plus d’alanine que les farines de soja ou d’arachide. Le lait et les œufs en poudre sont les champions de la valine. De bons points de départ pour stimuler des silures engourdis par le froid. Pour éviter les interactions malencontreuses, je m’efforce de rester simple et de ne pas mixer n’importe quoi. Si je pars sur un élément majeur, par exemple une farine de poisson, j’essaye de rester cohérent dans les huiles ou enrobages utilisés en complément si besoin. Une fois la matière première choisie, j’essaye de déterminer la texture qui offrira une bonne diffusion en eau froide. De petits tests simples consistent à immerger ces propositions d’eschage dans un même volume d’eau dont je fais varier la température, et d’en suivre heure par heure la lente dégradation.

Les acides aminés sont la base pour stimuler l’appétit du poisson mais ne sont pas seuls garants de l’efficacité d’un appât. Immergés dans une eau à 10°C pendant 12 h, nous avons donc testé quatre appâts, tous élaborés avec une même base de farine de poisson, mais dont les textures et les densités sont différentes. A gauche, l'appât est trop compact. Le deuxième est satisfaisant. Le troisième est trop friable et fragile. A droite, on voit l'impact du courant et du sable sur l’appât n°2. Bilan : l’appât n°2 peut être considéré comme satisfaisant en eau relativement froide (10°C) à condition d’être utilisé sur un bief calme.  
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Accélérer !

Si en eau chaude, il faut être vigilant sur la durée de tenue d’un appât sur le cheveu, en hiver, c’est l’inverse ! En eau froide, la dissolution très ralentie diminue considérablement l’efficacité de l’appât. Ajouter à cela des journées courtes : la contrainte temps est un élément crucial à prendre en compte.

De bons apéritifs

Les acides aminés ne sont pas les seules molécules à être potentiellement à même de booster l’appétit de nos chers silures. L’adénosine triphosphate (ATP) en est une autre, capable de délivrer de l’énergie aux cellules vivantes, notamment lorsqu’elle se dégrade en adénosine diphosphate (ADP). La présence d’ADP ou d’AMP (adénosine monophosphate) dans l’eau indique en effet aux silures la proximité de poissons blessés ou morts… De bons repas potentiels !

 

 

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Magazine n°907 - décembre 2020

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