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Le barbeau du Tage

Les barbeaux sont nombreux dans le monde et, en tant que cyprinidés, ne sont généralement pas considérés comme des carnassiers prédateurs, en particulier par les pêcheurs français. Ceci étant probablement dû au fait que, s’il arrive, en de très rares occasions, à « Barbus barbus » (le barbeau le plus représenté dans notre pays) de se saisir d’un micro-leurre ou d’un mini-streamer, il est le plus souvent capturé en pêchant au coup avec des asticots, du blé ou des cubes de fromage…

Pourtant, dans la grande famille des barbeaux du monde, il en existe quelques-uns qui sont essentiellement chasseurs, au point qu’on les recherche avant tout au leurre en pêche sportive. On pourrait ainsi citer les célèbres masheer indiens, la perche de jungle d’Asie du Sud-Est ou les grands barbeaux du Moyen-Orient qui occupent les bassins du Tigre et de l’Euphrate, et qu’on trouve du côté de l’Iran, de la Turquie ou de la Syrie. Mais il n’est pas nécessaire d’aller si loin pour accrocher au bout de sa ligne un barbeau résolument prédateur. Pour cela, découvrons ensemble ce superbe barbeau du Tage (Luciobarbus bocagei).

Un poisson qui atteint une taille respectable
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Barbeaux ibériques prédateurs

Si on s’intéresse de près aux détails des clés d’identification, on pourra distinguer près d’une dizaine d’espèces de barbeaux qui nagent dans les eaux douces de la péninsule ibérique. La plupart d’entre eux sont de petites tailles (20 à 50 cm) mais deux se distinguent par leurs dimensions et leurs mœurs prédatrices. Le comizo (Luciobarbus comizo) est le moins méconnu des pêcheurs de carnassiers, notamment parce que sa préférence marquée pour les eaux calmes, ou même inanimées, fait que ses populations se sont fortement développées dans les nombreux lacs de barrages établis sur les cours d’eau espagnols et portugais depuis un demi-siècle. Ces immenses plans d’eau attirant un grand nombre de pêcheurs de carnassiers (brochets, black-bass, sandres et silures) de toute l’Europe, le comizo est assez régulièrement capturé au leurre en recherchant d’autres espèces. Nous l’étudierons dans un prochain article. 

Une espèce bien représentée sur sa zone de distribution
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Un barbeau d’eaux vives

Au contraire, le barbeau du Tage est un poisson qui apprécie les rivières en mouvement, courant et les eaux vives. Il est endémique aux bassins occupant le versant atlantique de la péninsule ibérique. Ainsi, on ne le trouve qu’au Portugal et dans une partie de l’Espagne. Son aire de distribution est donc relativement restreinte, mais ses populations sont importantes au sein de celle-ci, et il n’est pas compliqué, pour un guide de pêche, d’amener ses clients sur ce poisson. Au Portugal, pays où il est le mieux représenté, on l’appelle barbeau commun, mais aussi barbeau du Nord ou barbeau du Tage, parce qu’il occupe principalement la moitié nord du pays. C’est un barbeau omnivore capable de se nourrir classiquement sur le fond de larves, d’invertébrés et autres détritus végétaux, mais qui présente également une tendance marquée à attaquer toutes sortes de poissons de petite taille comme les gardons ou les ablettes. Il ajoute régulièrement les écrevisses à son menu mais aussi des sandrillons ou des jeunes black-bass qu’il vient gober en bordure lorsque ceux-ci se prélassent au soleil. Ce comportement très agressif fait qu’il est possible de le rechercher exclusivement au leurre ou au vif.

Les leurres souples sont très efficaces
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Écologie du barbeau du Tage

Ce barbeau du nord occupe les grands fleuves comme le Tage ou le Douro aux courants modérés, mais également toutes les petites rivières aux eaux plus rapides qui les alimentent, et jusqu’au chevelu de ruisseaux aux eaux vives qui font penser à des biotopes à truites. Pendant la période de reproduction (souvent d’avril à juin), il a tendance à faire de courtes migrations pour gagner des eaux généralement plus agitées et plus oxygénées. C’est un poisson à croissance plutôt lente. La maturité sexuelle n’est atteinte que tardivement, 3 à 4 ans pour les mâles et jusqu’à 7 à 8 ans chez les femelles. C’est donc logiquement une espèce à forte longévité (jusqu’à 15 ans).

Il ne faut pas oublier les lames vibrantes pour rechercher le barbeau du Tage
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Pêcher le barbeau du nord

Ce poisson est actif toute l’année sur le plan alimentaire. On peut donc le pêcher en toutes saisons, même s’il faut noter que, au Portugal, il bénéficie d’une protection pendant sa période de frai (fermeture du 15 mars au 15 juin pour tous les barbeaux et les carpes). J’ai le souvenir de très beaux spécimens capturés en plein mois d’août sur le fleuve Douro, malgré les chaleurs écrasantes des étés lusitaniens, mais les sessions organisées sur des semaines moins caniculaires seront généralement plus favorables, en particulier les mois d’octobre et novembre. Pour le rechercher, on pratique une pêche très active, de prospection rapide avec des leurres de dimensions modestes (en général de 60 à 100 mm) adaptés à la taille de sa gueule. Ces barbeaux semblent occuper toutes les couches d’eau : on les voit se manifester (sauter ou marsouiner) au large et en pleine eau dans les grands fleuves, mais on les distingue également marauder le long des rivages lorsque la visibilité est suffisante. Néanmoins, c’est très souvent près des berges que se concentrent les actions de pêche. Les barbeaux y fréquentent les herbiers mais surtout les éboulis, les amas de rochers et de grosses pierres qu’ils semblent affectionner par dessus tout. Lorsqu’ils sont suffisamment proches du bord et que la visibilité est bonne, on les observe aisément en train de naviguer lentement ou de fouiller autour des structures à la recherche de nourriture. On pratique alors une pêche à vue particulièrement excitante. De très nombreuses familles de leurres sont susceptibles de les intéresser. En premier lieu, et ils sont souvent le premier réflexe du traqueur de barbeaux, les leurres souples type shad comme le célèbre One Up. Mais aussi les petites ondulantes, les casting jigs, les tail spinners, les petits poissons nageurs, notamment de formes crankbait, et enfin, à ne surtout pas oublier, les lames vibrantes de 10 à 15 g.

Des allures de bonefish…
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Un bonefish d’eau douce

Les eaux occupées par le barbeau du Tage présentent souvent une visibilité suffisante pour le pêcher à vue, notamment lorsqu’il est en train de se nourrir le long des berges. Parfois même j’ai vu ces barbeaux faire du tailing, c’est-à-dire se redresser dans l’eau pour fouiller le fond ou sous les cailloux, ce qui fait sortir un instant leur nageoire caudale de l’eau. Comme je le confiais à Philippe, un excellent guide français qui opère au Portugal et qui m’a fait découvrir ce poisson, par moments, on se croirait presque à la recherche de bonefish. Pêche de poissons en train de se nourrir et repérés à vue, utilisation de micro-leurres, bluffante similitude de silhouettes entre les deux poissons rappelleront sûrement des souvenirs de bonefish à ceux qui ont déjà opéré sur cette espèce marine. Mais c’est également la vaillance du barbeau du Tage, une fois ferré, qui m’a fait penser à cette comparaison osée, car le premier rush est vraiment extrêmement violent, et suivi d’un combat tout en puissance et en vitesse qui dure un bon moment. Dans un environnement de structures où le barbeau cherche souvent à se réfugier, hameçon ouvert et casses ne sont pas rares. Philippe m’a expliqué que bon nombre de ses clients, qui viennent avant tout pour le sandre, rechignent souvent à tenter la pêche de ce barbeau. Pourtant, lorsque les sandres sont vraiment « sur off » et que Philippe parvient enfin à les convaincre, nombreux sont ceux qui ont ensuite du mal à arrêter la recherche de ce vigoureux poisson… L’IGFA ne recense pas de record pour ce barbeau du Tage (Luciobarbus bocagei) mais c’est un poisson qui passe les 90 cm pour environ 8 kg. Et sur les berges des grands fleuves où il vit, les vieux pêcheurs affirment qu’il peut atteindre les 10 kg. Alors, record à établir : à vos cannes.

Barbeaux du nord en tailing.
Crédit photo : Fabrice Chassaing

Pour aller plus loin sur le barbeau :
Le barbeau de jungle 
Le barbeau méridional
10 conseils pour pour le barbeau
 

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