ALORS QUELLE EST CETTE FORCE QUI FAIT MONTER NOS BOUILLETTES, trompe les gardiens de but et dévie des ballons de basket ? C’est ce qu’on appelle l’effet Magnus. Prenons l’exemple théorique d’une bouillette qui serait immobile dans l’air mais qui serait en rotation. Elle entraînerait alors avec elle une mince pellicule d’air tout autour de sa surface, et qui tournerait dans le même sens de façon homogène. Et si maintenant on projette cette bouillette (qui continue de tourner sur elle-même) à l’aide d’un cobra, elle va rencontrer un flux d’air qui lui est opposé, un vent. Les deux effets vont alors s’ajouter. Au-dessus de la bouillette, celle-ci entraîne l’air dans le sens du vent car elle tourne. La vitesse de l’air au-dessus est donc plus grande, car elle est l’addition de la vitesse de la bouillette dans l’air et de sa vitesse de rotation. En revanche, en dessous, l’air est entraîné dans le sens inverse du vent : les deux flux d’air s’opposent. Par ces effets différents qui s’appliquent à une bouillette projetée en rotation, on obtient une vitesse de l’air beaucoup plus grande juste au-dessus de la bouillette qu’en dessous. C’est exactement le même principe qu’une aile d’avion qui est bombée sur le dessus. L’air doit parcourir une plus grande distance, et est donc accéléré. La pression juste au-dessus devient alors plus faible qu’en dessous et l’avion est aspiré vers le haut, ou poussé par une pression supérieure en dessous, c’est comme on veut !
EXEMPLE
Je prends l’exemple d’une fronde, c’est précis, mais ça ne va pas très loin. Il n’y a pas d’effet Magnus, car la bouillette n’est pas mise en rotation. De même, vous avez peut-être déjà essayé de lancer des bouillettes mouillées ou huilées au cobra. Les performances sont minables car dans le tube du cobra le liquide d’enrobage agit comme un lubrificateur antifrictions, et la bouillette ne tourne pas ou en tout cas pas très vite en sortie. Il faut qu’elle tourne, et plus elle tourne vite plus elle « vole » loin ! Il y a en fait pas mal de paramètres qui vont entrer en ligne de compte pour obtenir une forte performance de « cobratage ». Tout d’abord, le cobra doit être adapté au pêcheur. Ce qu’il faut c’est obtenir une vitesse maximale au bout du tube, donc lancer fort, mais aussi utiliser des cobras longs car cette vitesse angulaire est proportionnée au rayon. Plus on s’éloigne du centre de rotation (le poignet de celui qui « cobrate »), plus cette vitesse angulaire est grande, et donc la vitesse linéaire de la bille propulsée. Il faut aussi que la bouillette soit bien ronde pour l’aérodynamisme, et qu’elle accroche bien dans le tube. C’est cette qualité d’accroche qui va conditionner sa vitesse de
rotation.
La forme du cobra compte donc beaucoup, en particulier sa partie terminale. Lors d’un lancer, la bouillette vient en contact avec la courbure située à l’extrémité du cobra. Cette courbure permet d’imprimer la rotation à la bouillette. Il ne faut pas que le matériau soit lisse à cet endroit. Si c’est le cas, un bon coup de papier de verre peut améliorer la rotation et permettre de gagner pas mal de mètres au lancer ! L’énergie donnée à la bouillette lors du lancer est cinétique, c’est la moitié de la masse fois le carré de la vitesse – et une fonction carrée est une fonction exponentielle.
C’est donc très simple : ce qui est de loin le plus important c’est la vitesse imprimée au bout du cobra lors du lancer, il faut donc le choisir en conséquence. Aussi, une bille très dure se lancera moins loin qu’une bille un peu plus souple (il ne faut pas qu’elle casse non plus). Pourquoi ? Car une bille plus molle va se déformer davantage qu’une bille dure lorsqu’elle va arriver en contact avec la courbure terminale du cobra. En se déformant, sa surface de contact avec le matériau du cobra sera plus importante et sa vitesse de rotation sera plus grande, favorisant l’effet Magnus et l’envol de la bouillette vers la zone convoitée.