La limnologie, c’est-à-dire l’étude des systèmes écologiques des eaux continentales, divise les eaux présentes en surface en deux grandes catégories : courantes et stagnantes. Et en France, on sait que les deux ne manquent pas !
Publics et privés
Le silure, qui se répand sur notre territoire depuis bientôt un demi-siècle avec de formidables facultés d’adaptations, est aujourd’hui présent dans les deux. Mon histoire de pêcheur et mon affection prononcée pour les grands espaces et l’isolement font que j’arpente généralement des biotopes d’eau libre. Cependant, conscient de la multitude d’opportunités encore inexplorées qu’offrent les eaux stagnantes, la traque en étang s’est petit à petit invitée dans mes pratiques ces dernières années. Plans d’eau privés ou publics, il ne s’agit pas d’en faire ici une apologie à sens unique mais de dresser une sorte de bilan factuel de ce qu’est aujourd’hui la pratique de la pêche du silure en plan d’eau. Premier atout évident : les facilités d’installation. Dans la grande majorité des cas, l’accessibilité aux berges et la mise en œuvre du poste de pêche sont plus commodes qu’au cours de mes expéditions habituelles en eaux courantes. On pratique ici le plus souvent dans un environnement clos et sécurisé, pour soi, pour son matériel et son véhicule. Ayant connu quelques déboires sur certaines mises à l’eau fluviales ces dernières années (atteintes à l’intégrité du véhicule, vol de roue, dégradation de remorque…), j’avoue apprécier cette sérénité d’esprit en étang, surtout lors de sessions à vocation plutôt familiale.
Des contreparties
De nombreux étangs gérés spécifiquement pour la pêche à la ligne proposent même des postes tout confort, à la végétation entretenue. Des espaces bivouac, pêche et vie quotidienne parfaitement pensés. En contrepartie, il faut accepter de n’y être pas seul au monde. Lors de mes premières expériences, cet élément générait quelques grosses frustrations.
Une évolution
Habitué aux secteurs très peu fréquentés, j’avais pour habitude de m’installer où bon me semblait, de pouvoir tenter de repérer les poissons et de tendre mes lignes sans contraintes. Les seules étaient la contenance de mes bobines, le respect des autres usagers (souvent rares) et des lois de navigation. En étang, il est nécessaire de respecter le secteur de pêche du poste occupé tel qu’imposé par un éventuel règlement ou dans le respect des occupants des postes voisins, bien plus proches ici qu’en eau courante. Sur ce sujet, mon analyse, négative à l’origine, a évolué avec le temps. Pratiquer sur un secteur très contraint oblige en effet à approfondir réflexions et stratégies de pêche de manière à exploiter à fond l’espace restreint qui vous est accordé. Une sorte de thérapie forcée pour lutter contre le syndrome de la berge d’en face ou la recherche de cette herbe, toujours plus verte chez le voisin.
Adapter son matériel
Autre contrepartie majeure, l’adaptation de son matériel et des modes d’action. Les corps de lignes en tresse sont, par exemple, rarement acceptés par les gestionnaires de plan d’eau. Or, il y a belle lurette que le pêcheur de silure a abandonné le nylon. Néanmoins, je stocke et entretiens toujours précieusement trois bobines de rechange prêtes, remplies d’un gros nylon (40 à 50/100). Retrouver cette fragilité (50 % de résistance en mois, à diamètre égal) et cette élasticité ne me réjouit pas vraiment mais c’est une concession qui peut valoir de superbes moments au bord de l’eau. Pour être cohérent, j’utilise également des cannes de puissances raisonnables (100-300 g) avec des actions progressives. Je laisse donc mes cannes typées bouée à la maison et m’oriente vers mes références typées pellets voire mes cannes pour pratiquer aux leurres du bord… Pour pêcher au posé ? Bien sûr ! Quant à l’interdiction quasi systématique des ardillons, si j’ai commencé par écraser ceux de mes hameçons standards, j’utilise désormais directement des modèles qui en sont dépourvus : simple 7266B (VMC) ou triple 7554B (VMC). Avec un peu de recul, l’absence d’ardillon, qui m’inquiétait au début, n’occasionne en fait pas forcément plus de décrochages. Sur ces biotopes, il est en effet rare de passer par des ruptures de tension de la ligne pendant un combat comme cela peut être nécessaire en rivière, pour contourner un obstacle ou un muret immergé, par exemple. De plus, les plombs utilisés pour lester les lignes sont nettement plus légers en eau stagnante. J’utilise en général un lest d’environ 50 g en étang. Enfin, les distances de combat sont plus courtes et l’élasticité du nylon redevient finalement un atout, absorbant utilement coups de tête et belles défenses en chewing-gum des silures.
Les modes d'action
La première des choses à faire, quand on vient de la rivière, c’est d’accepter de remettre en cause des recettes techniques conçues pour de grands biotopes sur ces plus petits milieux. Les stratégies de pêche sont directement liées à la nature de l’étang. S’il est régulièrement occupé par des carpistes, les silures, surtout s’ils y sont nés, développent très vite une activité alimentaire quasi exclusive par fouissage. Dans ce type de plan d’eau, j’ai souvent vu des pêcheurs au vif ne réaliser que de maigres pêches tandis que sur les postes voisins, des lignes eschées de bouillettes ou de vers de terre faisaient un malheur. Dans ces cas de figure, ma préférence va vers le montage Kebab (présenté par l’ami Florent Marty dans le n° 803 d’avril 2012), en complément tout simplement de la bouillette ou des graines stars de la région ou de l’étang. Je n’hésite pas à demander aux propriétaires avec quoi ils nourrissent leurs carpes !
Cerise sur le gâteau
Je n’esche pas directement avec les graines, bien que ces silures s’en nourrissent sans rechigner, car elles ne sont pas assez sélectives mais je les utilise en amorçage, en complément d’appâts plus carnés : pellets extrudés, croquettes Frolics, SK30 (Starbaits), Marine Halibut Hook Pellets (Dynamite Baits). En étang, les silures sont encore peu pêchés et leurs robes sont parfois assez particulières. Cerise sur le gâteau, en plus des rempoissonnements organisés, il n’est pas rare que, au cours de ces vingt dernières années, des siluridés d’ornement aient été relâchés sauvagement dans certains plans d’eau.
Chasse aux trésors
C’est pourquoi, même si je n’envisage jamais de pratiquer en étang toute une saison, c’est à chaque fois avec une grande excitation que je découvre tel ou tel plan d’eau nouveau, l’espérant hanté par un poisson à la robe unique. Des lingots encore secrets aujourd’hui nagent dans certaines eaux calmes, c’est une certitude. Trouvez le vôtre, c’est tout le mal que je vous souhaite !
La nuit
Autre atout de la pêche dans certains étangs privés : la possibilité d’œuvrer de jour comme de nuit. Cet avantage n’est pas négligeable, surtout lorsque l’on recherche un poisson dont on sait que l’activité nocturne est considérable. Cela permet également, en famille une fois encore, d’initier les plus jeunes à la découverte en toute sécurité de la vie nocturne d’un écosystème.
Quelques références
Authentic Fishing (89) : environnement très sauvage.
Renseignements : www.authentic-fishing.com
Iktus (64) : quelques silures de plus de 100 kg qui m’échappent encore et toujours.
Renseignements : www.iktusbearn.com
L’étang des Gaulois (71) : aux leurres lors des journées brochets ou à la bouillette en période carpe.
Rens. : www.etang-des-gaulois.com
Eden Carpe (38) : sur l’étang de Saint-Anne, silures albinos.
Renseignements : www.edencarpe.fr
La Ferme de Tommelles (51) : étang spécial silure.
Renseignements : www.tommelles.com
La Fosse aux Glanes de Condéon (16)
Rens. : www.etang-arnaud.com