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La pêche du silure aux vers : éloge de la simplicité !

Lilian Fautrelle est clair, après quinze ans de pêche exclusive du silure, malgré les leurres artificiels modernes et les produits techniques, il ne part jamais sans son seau de vers de terre pour traquer le géant ! Et ce ne sont pas Jérémy Josserand, expert des pêches depuis la berge ni Laurent Ribeiro et son sacro-saint float tube qui le contrediront sur ce point. Le mot d’ordre est simplicité et efficacité.

Eaux teintées, pêche dans tes pieds !

Lorsque les eaux montent, à la suite d’une crue, Jérémy Josserand tend trois lignes depuis le bord dans des endroits stratégiques. Découvrons-les.

Jérémy guette la montée du niveau de la Seille à chaque pluie. C’est le moment de faire une belle session depuis le bord. 
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Le mois d’avril marque clairement une rupture dans nos milieux aquatiques. Les froids hivernaux s’estompent à la faveur d’un épisode de précipitations printanières, pour la première fois de l’année, les températures d’eau s’approchent, voire dépassent les 10°C en fonction des régions. Jérémy se hâte sur les berges de la Seille à la moindre amorce de montée des eaux. Pour lui, « ce sont les meilleures conditions possibles pour des journées de pêche mémorables aux vers de terre ». Il exploite les comportements naturels que génère la nature à ce moment-là. Les silures, revigorés par des eaux réchauffées, sont enclins à rallonger leurs déplacements afin de s’alimenter. Ils fouinent le long des berges où les opportunités alimentaires abondent.

Un sac, quelques cannes et basta

Ce que Jérémy apprécie pardessus tout, c’est la simplicité de cette approche printanière dans laquelle il n’y a que peu d’artifice. Un sac avec son petit matériel, deux ou trois cannes et basta. Comme toute approche statique, il faut trouver un poste prometteur avant de poser les lignes. Pour lui, l’idéal est un secteur de berge permettant d’exploiter à la fois une veine d’eau secondaire descendante et une « meuille ». La veine d’eau secondaire présente un flux d’eau dans le sens du courant principal mais moins tumultueux que ce dernier. La « meuille », c’est un vaste retour où le flux d’eau remonte le long d’une bordure. On la repère à la présence de mouvements légèrement tourbillonnants et des espaces plus calmes. « Si les conditions marquent franchement un début de crue, les pâtures immergées sont des postes de premiers choix ! Les silures viennent naturellement les fouiller à la recherche des petits animaux de La petite embarcation Depuis la berge, lorsque l’on veut atteindre de plus longues distances de pêche dans des biotopes plus grands, lorsqu’on est équipé de moulinets à tambour tournant qui ne sont pas conçus pour jeter ou tout simplement lorsque l’on n’a pas vraiment confiance en ses lancers, la dépose à l’aide d’un petit bateau pneumatique, même à quelques mètres du bord, est une option efficace. Elle est néanmoins tout de suite plus lourde en intendance. Eaux teintées bordure pris au piège par la montée des eaux, comme de petits rongeurs ou de gros lombrics ! » s’enthousiasme Jérémy.

Les cannes pointent vers le ciel, même pour ces pêches proches du bord afin de bien dégager les tresses d’un maximum de débris flottants.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

En plombée, "à l'ancienne"

Une fois le poste prometteur choisi, il utilise des cannes de 2m80 plutôt souples d’une puissance de 300 gr (Pro-Cat Short and Soft, Zeck Fishing), idéales autant pour propulser ses montages de 200 g depuis la berge que pour mener des combats à courtes distances sur sa rivière de taille petite à moyenne. Pour terminer le combo, il fixe un moulinet spinning robuste de taille 8 000 à 10 000 (Slammer IV, Penn). Malgré une pêche à courte distance, un moulinet de grosse taille est primordial, non pas pour sa grande contenance, qui a peu d’intérêt en petit biotope, mais pour son grand ratio de récupération permettant d’absorber rapide ment les coups de queue des grands silures. Avec une plombée de 200 g, un mou pendant le combat est synonyme de décroche assurée.

Une grappe de vers enfilée sur le triple et le simple est soutenue par un petit flotteur afin de séduire les gros poissons. 
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Un montage basique

Par expérience, et avec l’évolution du comportement des silures, Jérémy a relégué au second plan les montages très décollés avec de gros flotteurs sous-marins. Il préfère une pêche en plombée épurée et relativement fine. « Le but, c’est que mes vers de terre soient présentés le plus naturellement possible. Si ma ligne pêche une veine d’eau, je cherche à ce que ma présentation puisse subir légèrement le flux du courant, ce qui va naturellement empêcher ma bouchée de s’enfoncer dans le substrat. Pour cette raison, plus que dans un souci de discrétion, j’utilise un bas de ligne plutôt fin pour ce type de pêche, d’une résistance de 50 kg. »

Depuis la berge, lorsque l’on veut atteindre de plus longues distances de pêche dans des biotopes plus grands, lorsqu’on est équipé de moulinets à tambour tournant qui ne sont pas conçus pour jeter ou tout simplement lorsque l’on n’a pas vraiment confiance en ses lancers, la dépose à l’aide d’un petit bateau pneumatique, même à quelques mètres du bord, est une option efficace. Elle est néanmoins tout de suite plus lourde en intendance.
Crédit photo : Lilian Fautrelle

À tous les étages

Jérémy décolle légèrement l’un de ses montages. D’ailleurs, il n’aime guère le terme décoller : « Finalement, je cherche plus à équilibrer mon montage qu’à le décoller franchement. Si la bouchée se présente à quelques millimètres du sol, c’est parfait. Les micro-flotteurs de 3 g à 10 g grand maximum sont parfaits pour cela. » Une fois les trois montages à l’eau, place à la patience et à l’observation. Le premier but à atteindre pour ce multiple champion national et international de pêche du silure, c’est de « trouver rapidement la tendance » afin que chacune des cannes soit exploitée pleinement. « Dans de telles conditions, le bon secteur déniché et la bonne présentation trouvée, tu peux régulièrement enquiller dix touches dans la journée ! Autant d’action avec une approche vraiment simple qui favorise l’observation et la lecture du biotope, c’est génial, c’est un passage de l’année que je ne laisserais passer pour rien au monde ! » conclut-il.

Eaux de cristal, passe à la verticale ! 

Lorsqu’il faut aller chercher les silures dans leurs postes de tenue, un float tube allie discrétion et rapidité. Laurent Ribeiro nous indique les bons montages.

Concentré sur l’écran de son écho sondeur, Laurent anime doucement son montage esché de vers de terre sur la tenue des poissons. 
Crédit photo : Lilian Fautrelle

S i l’eau est cristalline avec un débit d’étiage, bon courage avant la première touche sur une plombée déposée à deux mètres du bord comme nous venons de le voir. Dans de telles conditions, c’est plutôt aux abords des postes de tenue qu’il faudra aller promener ses vers de terre pour espérer de belles cadences de touche. Pour ma part, je dirige ma petite barque le long des fosses des rivières canalisées ou contre les arbres noyés dans les zones plus sauvages. Laurent, lui, n’a d’yeux que pour son float tube dans ces conditions. Il se laisse dériver dans le Rhône et la Saône, sur les tombants mais aussi les remontées des grandes fosses. C’est sur ce type de postes de transition, entre les points les plus profonds des fosses et les plateaux de haut-fond, qu’il privilégie la recherche des silures engaillardis par les premiers réchauffements printaniers.

Le monde du silence

Pour Laurent, l’alliance d’une pêche à soutenir en verticale aux vers de terre et l’emploi d’un float tube sont une évidence. Comme Jérémy, toutes ses observations le conduisent à présenter une belle bouchée de vers le plus naturellement possible. Pour dériver en parfaite harmonie avec les mouvements naturels de la rivière, pour éviter les ombres de 5 m2 à la surface les jours ensoleillés, pour manœuvrer le plus silencieusement possible, quoi de mieux qu’un float et une paire de palmes ? « Il n’y a pas que la discrétion qui me pousse à utiliser le float tube. Son plus gros avantage par rapport à une embarcation, c’est la vitesse de réactivité, de placement et de replacement à la palme lors d’une action de pêche. Certes, la dissociation des mains pour la pêche et des pieds pour les déplacements demande un petit apprentissage mais après, la maniabilité du float tube est un réel avantage pour la pêche à soutenir aux vers de terre », argumente Laurent.

Un montage Silent prêt à être utilisé. Le disque, perpendiculaire au corps de ligne, provoque des mouvements erratiques au bas de ligne et aux appâts. 
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Le clonk, discret

« La seule chose qui peut venir troubler ce silence, ce sont bien sûr quelques petits coups de clonk qui sont pour moi indissociables de la pêche à soutenir aux vers de terre. Malgré toutes les discussions au sujet de son utilisation, ce bruit les faits et les fera toujours réagir. Cela me donne des indices précieux sur leur positionnement et leur humeur, même si parfois ce bruit peut provoquer quelques refus », témoigne-t-il. « Et puis, en matière d’accessibilité de la pêche à soutenir au plus grand nombre, le float tube est quand même une chouette option ! Les prix des modèles vraiment adaptés à la pêche du silure en toute sécurité avoisinent 400 à 450 euros aujourd’hui. » Le choix de Laurent s’est porté vers un float tube Madcat Belly Boat qu’il accessoirise selon ses préférences au moyen de patchs de fixation. « En fin de compte, ma configuration de base, celle qui me rapporte le plus régulièrement des poissons, c’est tout simplement mon float tube, un petit échosondeur, ma ligne directement tenue à la main, un gros plomb, plastifié mais nu, un bas de ligne, un triple et une belle boule de vers. Simple mais une efficacité chirurgicale. »

Soyez attentifs à la réglementation locale, ce type de teaser avec fausse tête et billes de silicium n’est pas toujours autorisé durant le mois d’avril. 
Crédit photo : Lilian Fautrelle

L'efficacité dans les détails

Le montage ressemble à celui à dandiner pour les perches, mais en version XXL. Laurent et moi insistons sur le fait que, dans cette simplicité, tous les composants doivent être sélectionnés avec soin. La tresse de corps de ligne est de gros diamètre et de grande résistance, plus de 50/100, au moins 50 à 60 kg de résistance linéaire. Les touches, tantôt discrètes, tantôt d’une violence inouïe, ne sont pas encaissées par l’élasticité d’un blank de canne. Toute la force mécanique se reporte sur la ligne, ses composants… et vos muscles ! Le choix de l’hameçon triple est déterminant. Il doit allier discrétion, finesse de fer, piquant exceptionnel et grande robustesse à l’ouverture… Laurent mise sur une qualité de touche augmentée grâce à des hameçons antistatiques recouverts d’un composant caoutchouc protégeant cette pièce métallique des contacts directs des silures et de leurs barbillons aussi agiles qu’une main pour palper nos présentations et pour détecter les pièges (MadCat A-Static Treble Hook 6X). Pour ma part, j’aime le compromis de performance piquant/robustesse des Kaptain 3X (VMC, 7557 Kaptain 3X) qui, grâce à leur courbure particulière, permettent de solidement ancrer les poissons même sur les touches courtes dans les parties dures de la mâchoire.

Deux modèles de triples efficaces et solides. Les Madcat sont revêtus de plastique limitant le contact du silure avec le métal. Quant aux nouveaux Kaptain VMC, ils sont super solides !
Crédit photo : Lilian Fautrelle

Et les appelants ?

C’est seulement après ces fondamentaux que Laurent se penche sur le type de teaser qui fera, ou pas, la différence. Sur les secteurs régulièrement pêchés, nos retours d’expériences nous amènent tous les deux à privilégier les teasers dits « silent ». Un large disque de caoutchouc ou de plomb formant un plan orthogonal par rapport à la ligne de pêche vient créer une colonne de dépression d’eau à chaque animation sèche vers le haut. Cela provoque un mouvement erratique des vers de terre très excitante. Cette option est idéale en avril partout en France du point de vue de la réglementation car il n’est pas composé d’un octopus au contraire de bon nombre d’autres appelants et ne peut pas être assimilé à un leurre à brochet.

Octopus, si légal

Dans certains départements, je peux utiliser les appelants avec octopus même en avril (dans le département de l’Aveyron ou sur le parcours de la retenue de Rivière sur le Tarn par exemple). Les modèles avec des perles en caoutchouc offrent un effet volume intéressant tout en restant silencieux. Je l’utilise de manière plus agressive que le plomb nu avec une stimulation au clonk plus rythmée. Les modèles avec des perles à base de silicium vont ajouter un cliquetis sonore qui peut, en fonction des journées, déclencher des touches très agressives, ou des refus quasi-systématiques. À vous de tester.

Quel bas de ligne

Laurent utilise différentes options concernant ses bas de lignes lorsque les silures sont trop tatillons. Il rallonge cette partie terminale, parfois jusqu’à un mètre sous le plomb pour donner encore plus de liberté et d’aspect naturel à la présentation. Parfois il confectionne un bas de ligne « Bungee Rig » où un brin d’élastique (Power Elastic 0.8 MadCat) vient amortir la prise en bouche du silure afin de limiter la sensation de résistance à l’aspiration et améliorer la qualité des touches.

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